Hervier, B., Ollame-Omvane, E., Gayed, C., Russick, J., Tarantino, N., Cremer, I., Benveniste, O., and Vieillard, V.
Le syndrome des antisynthétases (SAS) est une maladie auto-immune caractérisée par une myosite, une pneumopathie infiltrante diffuse et la présence d'un anticorps anti-ARNt-synthétase dont le chef de file est l'anti-Jo-1. Bien que mal connue, l'origine du SAS serait secondaire à l'exposition à des aérocontaminants et/ou des infections respiratoires. Ces événements induiraient le relargage de l'antigène Jo-1 dans le milieu extracellulaire, première étape de la rupture de tolérance au soi. Nous avons montré qu'il existait une infiltration massive de cellules NK-Granzyme B+ dans les poumons de patients atteints de SAS, associés à une diminution de l'expression d'un récepteur de cytotoxicité spécifique, NKp30, sur les cellules NK sanguines. La diminution de NKp30 a déjà été rapportée en contexte néoplasique, et corrèle avec l'expression anormale de ses ligands, dont BAT3, une molécule de stress cellulaire. Cette étude s'intéresse à l'impact possible des cellules NK et de BAT3 au cours du SAS. Depuis 2013, 53 patients avec SAS Jo-1 positif, traités ou non traités ont été inclus : 15 hommes (28 %), d'âge médian 48 ans (18-77). Vingt-sept patients actifs et 26 inactifs ont été comparés à 17 donneurs sains et 20 patients avec myosite non lié au SAS. La quantification de NKp30 sur les cellules NK sanguines était effectuée par RT-qPCR. Les dosages de BAT3 soluble (sBAT3) étaient quantifiés dans le serum et le lavage broncho-alvéolaire (LBA, n = 7) par ELISA. Un marquage anti-BAT3 était effectué sur les cellules figurées du sang et sur biopsie pulmonaire (n = 4). Dans un modèle in vitro, les cellules NK activées de patients et de contrôles étaient cultivées 6 h avec une lignée cible pulmonaire (A549), qui exprime BAT3 et Jo-1. L'effet des anti-NKp30, du BAT3 soluble recombinant et des inhibiteurs de Granzyme B étaient testés. Jo-1 était dosé dans les surnageants de culture par ELISA. Au cours du SAS, la diminution de l'expression de NKp30 par les cellules NK circulantes est d'origine post-transcriptionnelle, puisque les ARN messagers des trois isoformes connus A, B et C sont exprimés de façon équivalente chez les patients (n = 39) et les contrôles (n = 9). Ni les monocytes, ni les lymphocytes T et B sanguins de patients avec SAS n'expriment BAT3 (n = 8). Sur coupes histologiques, BAT3 est exprimé par les macrophages alvéolaires et les cellules épithéliales bronchiolaires. sBAT3 est retrouvé dans 6/7 LBA. Les titres de sBAT3 sériques sont significativement augmentés chez les patients atteints de SAS comparativement aux contrôles ou patients atteints de myosite non-SAS (250 vs. 134 et 179 pg/mL, p = 0,0002, respectivement). De plus, sBAT3 corrèle avec l'activité de la maladie (340 vs. 160 pg/mL, p < 0,0001). Chez 6/7 patients présentant une augmentation de sBAT3 sérique, le taux diminue sous traitement (605 à 266 pg/mL, p = 0,03). In vitro, les co-cultures de cellules NK avec les cibles A549 aboutit à la dégranulation des cellules NK et le relargage de Jo-1 dans le surnageant, chez les patients et les contrôles. À la différence des anticorps anti-NKp30 ou le sBAT3 recombinant, les inhibiteurs de Granzyme B diminuent le relargage de Jo-1 de 22 % (n = 3). La cytotoxicité des cellules NK contre des cellules pulmonaires exprimant BAT3 pourrait-être impliqué dans l'immunopathologie du SAS, en étant à l'origine du relargage de Jo-1 de façon dépendante de Granzyme B. En parallèle, sBAT3 pourrait être considéré comme un biomarqueur chez les patients atteints de SAS. [ABSTRACT FROM AUTHOR]