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Le problème de la véridiction peut être abordé sous l’angle du « croire » en tant que jugement épistémique. Cette perspective amène à vérifier les conditions qui font croire vrai un Texte-Discours. L’étude sur le croire proposée touche d’abord le problème du « monde naturel » envisagé comme « système de croyances » (épistémès) qui déterminent l’adhésion à/la reconnaissance de certaines valeurs qui, à leur tour, sanctionnent comme « réel » le monde sensé dans lequel nous sommes immergés. Le « croire » concerne aussi la grammaire narrative à propos des croyances culturelles présupposées des sujets. Ces deux points pourraient constituer le fondement d’une sémiotique de la culture qui jetterait un pont entre les travaux de Greimas et ceux de Lotman.

Cette contribution vise à évaluer la pertinence d’une sémiotique « ontologique » et « perspectiviste » fondée sur la rencontre avec les théories du « tournant ontologique » en anthropologie. Pour cela, nous chercherons à confronter les différents modèles en considérant que l’aspect « culturel » en anthropologie trouve sa correspondance avec le plan du contenu en sémiotique. Nous rappellerons d’abord les principes des propositions des trois auteurs principaux dans ce champ disciplinaire : Latour (1991 ; 2012), Descola (2005) et Viveiros de Castro (2009). Un examen critique permettra de montrer que la sémiotique (Greimas et Lotman) fournit déjà à l’analyste de la culture des outils efficaces pour circonscrire ce qu’on pourrait appeler des « ontologies » et pour rendre compte des différentes « perspectives ».

Notre article propose de discuter l’évolution de la pensée de Greimas en évaluant notamment quelques principes qui ont permis l’émergence de mouvements épistémologiquement différents, à partir de son héritage. A partir du réexamen d’ouvrages « critiques » des années 80-90 : le Tome 2 du Dictionnaire (Greimas ; Courtés, 1986), De l’imperfection (Greimas, 1987) et Sémiotique des passions (Greimas ; Fontanille, 1991), nous mettront en évidence les concepts portant en germe les tournants « post-greimassien ». Plus particulièrement, nous montrerons que les développements des modalités (Greimas, 1983) ont orienté la sémiotique vers le sujet et la subjectivité, l’énonciation et, finalement, une approche existentielle préfigurant la sémiotique du discours. Notre proposition critique cherchera à questionner la cohérence du modèle théorique greimassien comme cadre unique, stable et partagé de la communauté sémiotique.

Cet article se propose d’examiner le projet d’une sémiotique de la culture en considérant les contacts entre la sémiotique greimassienne et l’anthropologie. Les différences entre Greimas et Lévi-Strauss dans les années 1960 ont conduit la sémiotique à abandonner l’idée d’approcher la culture. Ces dernières années, la sémiotique post-greimassienne, tournée vers les pratiques et l’expérience, a renoué le dialogue en s’inspirant des propositions de Latour et de Descola pour rediscuter la notion de culture du point de vue des collectifs et des ontologies. À contre-courant de la recherche actuelle, nous défendons ici l’idée que le projet d’une sémiotique de la culture est déjà incarné par l’anthropologie structurale. Du fait de son héritage des méthodes linguistiques, qu’elle applique au terrain, et de son ouverture aux modélisations formelles comme aux approches phénoménologiques ou cognitives, elle nous paraît constituer un cadre sûr et suffisant pour étudier les cultures. Au croisement des approches de Greimas, Lotman et Lévi-Strauss, la théorie structurale en anthropologie et sémiotique paraît toujours d’actualité et ouvre de nouvelles perspectives de recherches avec les « cultures numériques ».