Iorio, Étienne, Dusoulier, François, Soldati, Fabien, Noël, Franck, Guilloton, Jean-Alain, Doucet, Guillaume, Ponel, Philippe, Dupont, Pascal, Krieg-Jacquier, Régis, Chemin, Stéphane, Tillier, Pierre, Touroult, Julien, ECOTER (Écologie & Territoires), 44 route de Montélimar, F-26110 Nyons (France), Direction générale déléguée aux collections (DGD.C), Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN), Office national des forêts (ONF), La motte, Saint-Martin-de-Connée, F-53160 Vimartin-sur-Orthe (France), La Close des Saules, F-44810 Héric (France), 8F rue Maurice Deslandres, F-21000 Dijon (France), Institut méditerranéen de biodiversité et d'écologie marine et continentale (IMBE), Avignon Université (AU)-Aix Marseille Université (AMU)-Institut de recherche pour le développement [IRD] : UMR237-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Patrimoine naturel (PatriNat), Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Office français de la biodiversité (OFB), and Opie-Odonates, BP30, 78041 Guyancourt cedex (France)
International audience; Environmental impact studies are a regulatory process to assess projects that may have significant environmental impacts. It includes a “natural environments” section, where an ecological diagnosis gives an initial status of the site to be assessed, including its wildlife, botanical and habitat concerns, based on bibliographical references and dedicated surveys. The result is the proposal for “ERC” measures (avoid, reduce, compensate) to preserve the environmental issues identified prior to the project. Arthropods are by far the most diverse phylum of the animal kingdom, and should therefore have an important place in an environmental impact study. However, only four orders have species listed in the current regulations, and the phylum of arthropods is poorly represented compared to vertebrates. The review of 50 impact studies shows that only three main groups are studied, relatively related to existing protections: butterflies (Zygaena included), dragonflies and Orthoptera, and some protected saprophagous wood-boring beetles. A ‘closed-loop’ effect occurs, likely inherent in the regulations and many of the associated actions, as these groups are the ones on which knowledge is most advanced and which are the subject of most Red List assessments. This imbalance between the groups covered in the impact studies and the actual diversity of continental arthropods, their specialisations and ecological functions, and their particular distributional characteristics, means that the issues at stake are assessed unequally depending on the habitats and geographical sectors concerned. Thus, butterflies and Orthoptera primarily highlight species and conservation issues for grassland environments, followed secondarily by moors, thickets and scrubland ; dragonflies for freshwater environments. Butterflies and dragonflies also include a significant number of species of concern that are associated with peat bogs and marshes. These groups are generally good indicators of the issues affecting these habitats. The beetles that appear most regularly in impact studies highlight isolated trees, hedgerows, tree lines and forest edges. On the other hand, these groups are very few valuable to highlight conservation issues for arthropods of the coastal and closed forest environments. Butterflies and dragonflies are among the arthropods with the lowest rates of endemism in metropolitan France, which means that this conservation issue is under-represented in the impact studies. Functional guilds such as coprophagous, necrophagous or litter predators and decomposers are virtually almost forgotten in impact studies. This article proposes six groups for which knowledge has progressed well over the last 10 to 20 years and which would provide an ecological and taxonomic complement to the species currently used in regulatory studies: centipedes (Chilopoda), woodlice (Isopoda, Oniscidea), long-horned beetles (Cerambycidae and Vesperidae), Scarabaeoidea and Tenebrionidae, and shield-bugs (Heteroptera, Pentatomoidea). Most of the species of high concern in these six groups are found on beaches or dunes, forests or environments such as caves, cliffs or screes. Centipedes, woodlice and Tenebrionidae beetles have a large number of endemics and a high national responsibility. Beaches and coastal environments, from the shore to the dunes, are the most striking example of under-representation in protected species and current impact studies, with dozens of specialised species at risk and no umbrella species to protect them. To a lesser extent, the same applies to closed forests. Caves appear to be of less concern. However, the often narrow distribution of the endemic arthropods they house means that the stakes are not to be underestimated. The protection lists therefore need to be completed with groups other than those taken into account so far, but in a manner appropriate to continental arthropods. Protection should prioritise habitats and not specimens, in correlation with the particularities of their study and their biology. For butterflies, dragonflies and Orthoptera, although a large number of regulated species remain relevant, the lists need to be revised. This study proposes a list of 135 species with high conservation concerns in nine arthropod groups. If this list was taken into account by environmental agencies, landscape planners and environmental authorities, it would reflect the challenges for continental arthropods in impact studies and thus enable measures to be taken that are better suited to their conservation.; L'évaluation environnementale est un processus réglementaire visant à évaluer les projets de travaux ou d’aménagements qui peuvent avoir des incidences sur l’environnement. L’étude d’impact comporte un volet « milieux naturels » dans lequel un diagnostic écologique donne un état initial du site, notamment de ses enjeux faunistiques, floristiques et d’habitats, à partir de la bibliographie et de prospections dédiées. Il s’ensuit la proposition de mesures « ERC » (éviter, réduire, compenser) visant une neutralité écologique entre incidences et gains générés. Les Arthropodes constituent de loin le phylum le plus diversifié du règne animal, et devraient logiquement y tenir une place importante. Pourtant, en France, seuls quatre ordres comportent des espèces inscrites dans les textes réglementaires nationaux et européens. Le phylum des Arthropodes y est donc très peu représenté comparativement aux Vertébrés. Cet article questionne la place des Arthropodes dans les études d’impacts, leur utilité pour identifier des enjeux sur leurs habitats, et propose de nouveaux groupes qui pourraient apporter un complément à la fois taxinomique et écologique. L’examen d’un échantillon de 50 études d’impact montre que seuls trois principaux groupes y sont étudiés, tous comportant des espèces protégées : les papillons diurnes (Rhopalocères et Zygaena), les Odonates (Odonata) et les Orthoptères (Orthoptera) ; ainsi que quelques Coléoptères saproxylophages réglementés. Un effet « vase clos » probablement inhérent à la réglementation s’observe, car ces groupes sont ceux sur lesquels les connaissances progressent le plus et qui font l’objet de la plupart des évaluations de type Liste rouge. Ce déséquilibre entre les groupes abordés dans les études d’impact et la diversité réelle des Arthropodes continentaux, de leurs spécialisations et fonctions écologiques, de leurs particularités de répartition, induit que leurs enjeux sont évalués de manière inégale selon les habitats et secteurs géographiques concernés. Ainsi, les papillons diurnes et les Orthoptères mettent principalement en exergue des espèces et des enjeux de conservation pour les milieux prairiaux, puis secondairement les landes, fourrés et garrigues ; les Odonates les milieux dulcicoles. Les Rhopalocères et Odonates comportent également un nombre non négligeable d’espèces à enjeux inféodées aux tourbières et marais. Ces groupes sont globalement de bons indicateurs des enjeux pour ces habitats. Les Coléoptères qui reviennent le plus régulièrement dans les études d’impact mettent surtout en valeur les arbres isolés, le bocage, les alignements d’arbres et les lisières forestières. A contrario, les milieux littoraux et les milieux forestiers fermés ne sont que très peu valorisés par ces groupes. Les papillons diurnes et Odonates sont parmi les Arthropodes avec les plus faibles taux d’endémisme en France métropolitaine, ce qui, de fait, sous-représente cet enjeu de conservation dans les études d’impacts. D’un point de vue fonctionnel, les coprophages, les nécrophages ou encore les prédateurs et décomposeurs litiéricoles sont aussi quasiment oubliés dans les études d’impacts. Cet article propose six groupes pour lesquels les connaissances ont bien progressé depuis 10 ou 20 ans et qui apporteraient un complément écologique et taxinomique aux espèces actuellement utilisées dans les études réglementaires : les Chilopodes (Chilopoda), les Isopodes terrestres (Isopoda, Oniscidea), les Coléoptères « Longicornes » (Cerambycidae et Vesperidae), Scarabaeoidea et Tenebrionidae, les Hétéroptères Pentatomoidea. La plupart des espèces à enjeux de conservation élevés de ces six groupes se situent sur les plages ou les dunes, les forêts ou les milieux tels que les grottes, les falaises ou les éboulis. Les Chilopodes, les Isopodes terrestres et les Coléoptères Tenebrionidae comportent un grand nombre d’endémiques induisant une responsabilité nationale élevée. Les plages et milieux côtiers, de la partie médiolittorale supérieure aux milieux dunaires, constituent l’exemple le plus frappant de sous-représentation au sein des espèces protégées et des groupes actuellement priorisés dans les études d’impact, comportant des dizaines d’espèces spécialisées à enjeux apparaissant menacées et aucun « parapluie » ne permettant de bien les préserver. De façon moindre, il en est de même pour les forêts fermées. Les grottes paraissent d’emblée moins concernées ; cependant, la répartition souvent étroite des Arthropodes endémiques qu’elles abritent leur confère des enjeux à ne pas négliger. Les listes de protection paraissent donc à compléter par d’autres groupes que ceux pris en compte jusqu’ici, mais de manière appropriée aux Arthropodes continentaux : protection priorisant les habitats et non les spécimens, en corrélation avec les particularités de leur étude et de leur biologie. Pour les papillons diurnes, Odonates et Orthoptères, bien qu’un grand nombre d’espèces réglementées demeure pertinent, les listes paraissent à réajuster. La présente étude propose une liste argumentée de 135 espèces à forts enjeux de conservation dans neuf groupes d’Arthropodes. La prise en compte de l’ensemble par les bureaux d’études, les aménageurs et les autorités environnementales permettrait de refléter les enjeux des Arthropodes continentaux dans les études d’impact et donc de prendre des mesures plus adaptées à leur conservation.