Draelants, Isabelle, Institut de recherche et d'histoire des textes (IRHT), Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Atelier Vincent de Beauvais, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Laboratoire d'Histoire des Sciences et de Philosophie - Archives Henri Poincaré (LHSP), Université de Lorraine (UL)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Lorraine (UL)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Centre de Médiévistique Jean-Schneider, Université Nancy 2-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université Nancy 2-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Craig Baker, Grégory Clesse, Matthia Cavagna, and Draelants, Isabelle
Albert the Great took a significant place in the liveliness of the medieval intellectual debate on the role of the organs and faculties of the soul in the 13th century. His Commentary on the Zoology of Aristotle (De animalibus, grouping HA, PA, GA) written between 1255 and 1263 and the Quaestiones devoted during his teaching in Cologne in 1258 to the same zoological works, are examined here. The purpose is, on the one hand, to highlight the function given to the diaphragm as an organ in relation to the other parts of the body and as a "transmission wall" between sensation, appetites and intellect, and on the other hand, to analyse the role Albert the Great confers the diaphragm in the emotions. In the passages relating to this "bodily topography of emotions", the diaphragm takes place in the middle of an anatomical map animated by vegetable, animal and rational souls, in a hierarchical, but also metaphorical, organic community of the human body. The noble organs of the heart and brain, the respective seats of vital heat and soul on the one hand, and the intellect on the other, are located above the diaphragm, which constitutes their fortification against the harmful humours emitted from the servant organs below, avoiding that they affect the upper limbs through breaths or spirits (spiritus), as happens by accident. The heart is the lord and the centre of the animation of this kingdom. Emotion medically takes its place on the liver and bile side, which can send the dark moods of anger upwards, but in the case of laughter, it is also caused by a kind of breach in the diaphragm protection wall when a tickle, or a movement resulting from a change in the heat of the heart (phenomena that are specific only to humans), sets it in motion. Intellectually, emotion also has its place in the anterior part of the brain, which is why it is expressed through the physiognomy. The implications of these notions also link emotions to the virtues of practical morality. From the passages here examined, it emerges that emotions, while not a central concern, are nevertheless an epistemic subject in Albert the Great's natural philosophy as they are today., Dans l’effervescence du débat intellectuel médiéval autour du rôle des organes et des facultés de l’âme au XIIIe siècle, Albert le Grand prend une place notable. Son Commentaire sur la zoologie d’Aristote (De animalibus, regroupant HA, PA, GA) rédigé entre 1255 et 1263 et les Quaestiones consacrées pendant son enseignement à Cologne en 1258 aux mêmes œuvres zoologiques, sont examinés ici pour, d’une part, mettre en évidence la fonction accordée au diaphragme comme organe en relation avec les autres parties du corps et comme paroi de transmission entre la sensation, les appétits et l’intellect, et pour, d’autre part, analyser le rôle que lui accorde Albert le Grand dans les émotions. Dans les passages relatifs à cette « topographie corporelle des émotions », le diaphragme prend place au milieu d’une carte anatomique animée par les âmes végétale, animale et rationnelle, dans une communauté organique hiérarchisée, mais aussi métaphorique, du corps humain. Les organes nobles du cœur et du cerveau, sièges respectifs de la chaleur vitale et de l’âme d’une part, de l’intellect de l’autre, sont disposés au-dessus du diaphragme, qui constitue leur fortification contre les humeurs nocives émises des organes serviteurs d’en bas, en évitant qu’elles n’affectent les membres supérieurs via des souffles ou esprits (spiritus), comme cela arrive par accident. Le cœur est le seigneur et le foyer d’animation de ce royaume. L’émotion prend médicalement sa place du côté du foie et de la bile, qui peuvent renvoyer les humeurs noires de la colère vers le haut du corps, mais dans le cas du rire, elle est aussi provoquée par une sorte de brèche dans le mur de protection du diaphragme quand un chatouillement, ou un mouvement issu d’une modification de la chaleur du cœur (phénomènes qui ne sont propres qu’aux humains), le mettent en branle. Intellectuellement, l’émotion a aussi sa place dans la partie antérieure du cerveau, c’est pourquoi elle s’exprime par la physionomie. Les implications de ces notions relient aussi les émotions aux vertus de la morale pratique. Des passages examinés, il ressort que les émotions, si elles ne sont pas une préoccupation centrale, constituent néanmoins un sujet épistémique dans la philosophie naturelle d’Albert le Grand comme aujourd’hui.