1. Le rousseauisme, une théorie critique de la démocratie
- Author
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Lafon, Stéphane, Centre de Recherches Interdisciplinaires en Sciences humaines et Sociales de Montpellier (CRISES), Université Paul-Valéry - Montpellier 3 (UPVM), Université Paul Valéry - Montpellier III, Luc Vincenti, and STAR, ABES
- Subjects
Démocratie ,[SHS.PHIL] Humanities and Social Sciences/Philosophy ,Rousseauisme politique ,Criticism of democracy ,Citoyenneté ,[SHS.PHIL]Humanities and Social Sciences/Philosophy ,Citizenship ,Critique de la démocratie ,Jean-Jacques Rousseau ,Political virtue ,Vertu politique ,Political Rousseauism ,Democracy - Abstract
Studies of the Genevan philosopher’s writings, and particularly his politic ones, leads us to question the possibility of seeing a critical theory about democracy in rousseauism. The major political principles set in Contrat social, refined in Lettres écrites de la montagne and applied to practical cases in Considérations pour le gouvernement de la Pologne and Projet de constitution pour la Corse, can provide the analysis standard sand judgment that allows to put into perspective our democratic modernity. Firstly, it is about showing that the principles of his political thinking, in Lettres écrites de la montagne, allow him to criticize the oligarchical drift of Geneva’s Republic (from a democracy in the XVst century to an oligarchy in the XVIIIst century) and government’s usurpation of sovereignty. Secondly, it is about highlighting his criticism of democracy’s forms (representative, direct, deliberative). Thirdly, it is about identifying critical comments that Rousseauism makes possible towards contemporary democracy (representative and liberal). Fourthly, it is about emphasizing his political theory as a meaning to raise awareness of the fact that democracy is restricted in the contemporary policy. As a critical theory of democracy, political Rousseauism clarifies what is a true democracy or not and, in the same time, it unveils a specific definition of a common power, the people’s effective sovereignty. This is a conception of democracy that his theory about government contributes to enlighten - preferring an aristocratic government leaning on an active political virtue and revealing that the form of this legal authority is not a criteria for democracy (republic). Different critical interventions of Rousseauism about democracy (“weak”: legitimating representative democracy, “strong”: considering a transformation of politic societies) highlight political principles and means that question the nature and operation of contemporary representative democracies (supremacy of the executive power, and hence dispossession of the people’s sovereignty). The political thinking of the Genevan philosopher invites to look for the means of a true expression of people’s sovereignty in the context of his definition of absolute participative democracy, in the way that it commands the effective participation of all citizens to legislative, condition for a retrieval of general will. A true democracy must ensure an ability of criticism and an actual control of executive power’s actions through the legislative power. Thus, political Rousseauism can appear as a prophylaxis of the democracy’s oligarchical drift, the update of political virtue hence act as the privileged expedient. From there we can assess the importance of thinking the means of achieving this virtue, the preventive means of a neutralisation of the oligarchical ferments of any political society that make impossible general will’s expression., L’étude des textes du philosophe genevois, et en particulier de ses écrits politiques, nous a conduit à interroger la possibilité de voir dans le rousseauisme une théorie critique de la démocratie. Les principes politiques majeurs posés dans le Contrat social, approfondis dans les Lettres écrites de la montagne et rapportés à des cas pratiques dans le Projet de constitution pour la Corse et les Considérations pour le gouvernement de la Pologne, peuvent en fournir les critères d’analyse et de jugement, permettant une mise en perspective sur notre modernité démocratique. Il s’agit premièrement de montrer que les principes de sa pensée politique lui permettent de critiquer, dans les Lettres écrites de la montagne, la dérive oligarchique de la République de Genève de son temps (d’une démocratie au XVe siècle à une oligarchie au XVIIIe siècle) et l’usurpation de la souveraineté par le gouvernement ; deuxièmement de mettre en exergue sa critique des formes de démocratie (représentative, directe et délibérative) ; troisièmement de recenser les interventions critiques que le rousseauisme permet sur la démocratie contemporaine (représentative et libérale) ; quatrièmement de souligner que sa théorie politique permet une prise de conscience du caractère démocratique restreint de la politique contemporaine. En tant que théorie critique de la démocratie, le rousseauisme politique permet de détromper sur ce qu’est une démocratie véritable, tout en en révélant en filigrane une définition spécifique, celle de la souveraineté effective du peuple, d’un pouvoir commun de tous ; une conception de la démocratie que sa théorie du gouvernement, accordant une préférence à un gouvernement de type aristocratique reposant sur la vertu politique en acte et révélant que la forme de cette magistrature n’est pas un critère de démocratie (république), contribue à éclairer. Les différentes interventions critiques (« faibles » : rendre légitime la démocratie représentative ; « fortes » : envisager une transformation des sociétés politiques) du rousseauisme sur la démocratie mettent ainsi en lumière des principes politiques et des moyens, qui interrogent la nature et le fonctionnement des démocraties représentatives contemporaines (suprématie du pouvoir exécutif, dépossession de fait de la souveraineté du peuple). La pensée politique du Genevois invite à rechercher les moyens d’une expression réelle de la souveraineté du peuple dans le cadre de sa définition forte d’une démocratie participative absolue, au sens où elle commande la participation effective de tous les citoyens au législatif, condition de dégagement de la volonté générale. Une démocratie véritable doit garantir un pouvoir de critique et de contrôle réel de l’action de l’exécutif par le pouvoir législatif. Le rousseauisme politique peut alors prendre la forme d’une prophylaxie de la dérive oligarchique de la démocratie, l’actualisation de la vertu politique agissant alors comme l’expédient privilégié. De là mesure-t-on l’importance de penser les moyens de la réalisation de cette vertu, les moyens préventifs d’une neutralisation des ferments oligarchiques de toute société politique qui rendent impossible l’expression de la volonté générale.
- Published
- 2019