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L’histoire dite « maritime », qui conçoit dans leur globalité tous les faits liés à la mer, a connu des avancées considérables depuis l’après-guerre. Dans le sillage ouvert par le courant des annales, plusieurs grands médiévistes français s’étaient fixé pour cap d’aborder l’évolution des sociétés littorales au travers de leur vie matérielle et des facteurs de leur développement. Grâce aux travaux pionniers qu’ils ont conçus, puis à ceux de leurs disciples, nous percevons assez bien aujourd’hu...

C’est durant la seconde moitié du Moyen Âge que fut mis en place l’essentiel du dispositif portuaire de la France atlantique. Cette genèse s’inscrit dans le même rythme que les grands mouvements de croissance économique puis de crise qui ont marqué l’Europe occidentale à cette époque. Au cours des soixante dernières années, les médiévistes ont beaucoup étudié les sociétés littorales et avec elles les trafics, les marchandises et les navires, mais ils se sont peu préoccupés des espaces portuaires à partir desquels leurs activités étaient rendues possibles. Les cales et les quais, les bassins de stationnement, tous les dispositifs qui permettaient le service des vaisseaux sont passés sous leur regard, ce dernier restant fixé sur les horizons maritimes plus ou moins lointains du commerce et de la pêche. Les ports, considérés en tant que territoires à part entière et non pas comme de vagues appendices urbains ou de simples outillages du négoce, n’ont que très peu attiré l’attention. Il en va de même des efforts considérables consentis par les populations et les autorités publiques qui, face aux menaces d’érosion et d’envasement, ont voulu préserver les lieux dans lesquels les navires trouvaient refuge et par lesquels les denrées circulaient. Les ports sont en cela exceptionnels : ils ont parfois suscité, auprès de sociétés souvent enclines à renoncer devant la force des phénomènes naturels et des changements environnementaux, des réactions collectives de grande ampleur destinées à y résister. Fondé sur une somme significative de monographies produites depuis le xixe siècle, portant sur les agglomérations maritimes et les provinces littorales, ainsi que sur un corpus important de sources nouvelles tirées des archives centrales, cet ouvrage entend rassembler et organiser nos connaissances relatives aux ports du xie au xve siècle. C’est un tableau géohistorique qui présente une vue d’ensemble de la cartographie portuaire de l’époque, en référençant quelque 620 sites. Il fournit de surcroît, dans un but utilitaire, une somme d’informations et de faits nécessaires aux recherches qui sont et seront conduites à leur sujet.

Les petits ports du pays de Caux Le contexte environnemental qui préside à l’établissement de ports en pays de Caux est quant à lui dominé par d’imposantes falaises entaillées de plusieurs brèches creusées par de petits fleuves côtiers suintant du plateau. Elles constituèrent autant d’opportunités que saisirent les populations littorales, et ce souvent dès l’Antiquité. Il est possible d’en ressortir neuf des sources médiévales. Même s’il n’est pas explicitement désigné comme portus dans les t...

Les ports de la basse vallée de la Somme En cette zone, l’élection des ports a été en grande partie gouvernée par les évolutions sensibles de la topographie des estuaires, remaniée en permanence du fait de l’ensablement et du déplacement du cours de ces fleuves. Remarquons aussi immédiatement qu’ils connurent tous les trois une activité navale notable dès l’Antiquité. Au xixe siècle, la Somme commençait à être navigable en amont depuis Bray. Au niveau d’Amiens débutait le tronçon dévolu au se...

Les petits ports de la basse vallée de la Loire En ce qui concerne la Loire, l’exercice d’inventaire conduit à des conclusions assez proches de celles observées pour la Gironde et la base vallée de la Garonne : ni Nantes, ni Bordeaux, ne disposèrent d’avant-port à l’embouchure de leur fleuve. La pêche et la saliculture d’abord, le transport de produits agricoles ensuite, ont de la même manière stimulé la naissance de plusieurs lieux d’accueil pour les navires. S’agissant la Loire, les géograp...

Les petits ports du Labourd Le long de la courte portion rocheuse de la côte gasconne, au pied du massif pyrénéen, avaient été fondées au moins cinq localités portuaires : Hendaye, Ciboure, Saint-Jean-de-Luz, Biarritz et Anglet. Voici la description de ce littoral que faisaient encore les services de l’amirauté à la fin du xviiie siècle : « C’est une côte herissée de rochers qui en rend le cours impraticable et l’approche très dangereux pour les batimens. Elle est heureusement coupée par l’ou...

Les petits ports de la Gironde La Gironde, de la pointe de la Coubre jusqu’au bec d’Ambès, comprend environ 150 km de rives, auxquelles il faut ajouter pour notre étude les sections de la Dordogne et de la Garonne remontant jusqu’à Libourne et Bordeaux, soit un total de quelque 290 km. La documentation médiévale révèle l’existence d’une cinquantaine de ports, soit un tous les 6 km. Mais il y a tout lieu de relativiser ces chiffres, compte tenu de la quarantaine de sites supplémentaires identi...

Les petits ports des marais salicoles de Saintonge Sur le pourtour des côtes saintongeaises comprises entre le pertuis de Maumusson, l’estuaire de la Charente et la façade orientale de l’île d’Oléron, la production de sel connut une très forte croissance, en particulier au sein de l’estuaire de la Seudre et du golfe de Brouage. L’occupation des marais littoraux dans le but d’y aménager des aires saunières fut concomitante avec la naissance ou le développement de plusieurs lieux de transbordem...

Henri Touchard – qui au demeurant s’est assez peu intéressé aux questions portuaires – dénombrait dans ses sources de la fin du xive siècle une centaine de ports de toutes dimensions. Ces derniers parsemaient de façon inégale les côtes du duché, entre l’estuaire de la Loire et Saint-Malo. Hélas, si cet inventaire a été rendu possible, ce n’est pas au moyen d’informations évoquant directement les sites portuaires en question, mais grâce à leurs marins qui, parcourant de part et d’autre l’Atlan...

Au terme de ce tableau descriptif consacré aux ports de la France atlantique, ce sont quelque 623 sites que nous avons pu, d’une manière ou d’une autre, identifier. Ce chiffre, important en lui-même, est d’autant plus significatif qu’il est probable que d’autres endroits, certes modestes, ont échappé à notre regard, en raison du silence des sources comme de leur existence parfois temporaire ou interlope. Il constitue probablement le niveau culminant des ramifications portuaires qui ont existé...

Les petits ports de la basse vallée de la Seine Le travail de Marcel-Adolphe Hérubel sur les ports de la Seine-Maritime a été en partie repris par Jimmy Mouchard dans sa thèse soutenue en 2008 sur les sites portuaires gallo-romains et médiévaux de l’estuaire de la Seine, de sorte que nous disposons aujourd’hui d’un inventaire suffisamment complet et factuel pour appuyer l’essentiel de nos observations. Depuis Chef-de-Caux jusqu’à Rouen, nous avons dénombré plus de 90 sites portuaires de toute...

La plaine maritime flamande a connu l’action de processus hydrologiques et sédimentaires complexes au cours du millénaire médiéval. L’élévation de cordons littoraux, à une bonne dizaine de kilomètres de la bordure continentale, a piégé les eaux des fleuves côtiers ruisselant des plateaux et collines alentours. L’accumulation progressive des limons combla cet espace interstitiel pour former des tourbières et des terrains cultivables. Dans le même temps, de façon épisodique, la mer rompit par e...

Les ports du Cotentin La qualité des littoraux variés du Cotentin a permis l’implantation, dès l’Antiquité, de plusieurs petits ports, et ce en dépit de l’isolement conféré par sa situation péninsulaire. Si on excepte les espaces estuariens, nous en repérons une trentaine, la grande majorité n’apparaissant que de façon incidente dans les textes. L’archéologie des hameaux et des villages littoraux n’a quant à elle – pour le moment tout du moins – pas permis de mettre en évidence des plages por...

Le 21 mai 1199, à Orvieto, assez tard dans la soirée, Pietro Parenzo, après avoir été enlevé par un groupe d’opposants, meurt assassiné dans une misérable maison d’un faubourg de la ville. Ce membre d’une importante famille de la noblesse romaine (cf. fig. 1, en annexe) avait été envoyé par le pape Innocent III, en février de la même année, à la tête de cette cité toscane située au nord du Patrimoine de saint Pierre pour y exercer les fonctions de recteur, avec pour mission d’y rétablir la pa...

Dans l’histoire du monachisme occidental, les grandes figures abbatiales incarnent par excellence les courants réformateurs. Il en est ainsi par exemple des premiers abbés de Cluny. Souvent, la mise en œuvre de telle ou telle réforme est conduite par l’abbé. Est-il possible de saisir sur le vif la manière dont est exprimé le rôle de l’abbé ? Dans cette perspective, notre attention s’est portée sur la période pré-grégorienne dans l’Ouest ligérien. À partir, en effet, des années 956-960, la « r...

Si l’histoire traditionnelle de l’hérésie au Moyen Âge s’est longtemps confondue avec celle des exclus de la société, l’approche récente se focalise davantage sur les diverses autorités qui, au coeur du pouvoir, élaborèrent la norme religieuse : l’hérésie n’existe que parce que l’orthodoxie en a d’abord décidé. Il reste que, loin de se présenter comme une essence immuable, elle s’impose tout au long du Moyen Âge comme un concept et une qualification d’une très grande plasticité. L’extension progressive du domaine de l’hérésie à de nombreuses formes de dissidence finit par lui assurer le statut d’un crime englobant. Cette enquête collective repose sur la conviction que c’est encore en se situant aux marges de l’hérésie, au contact d’activités répréhensibles voisines, telles que l’usure, la sorcellerie ou encore la rébellion politique, que l’on peut le mieux saisir les principes et les mécanismes de la fabrique de l’hérésie.

Moins d’un mois après avoir témoigné dans le cadre du procès en nullité de la condamnation de Jeanne d’Arc (3 mai 1456), le duc Jean II d’Alençon était de nouveau entendu par la justice. Il ne s’agissait plus, cependant, de concourir à la réhabilitation de la Pucelle, mais bien d’affronter une accusation aussi grave que sidérante à propos d’un prince du sang et pair de France. Jean d’Alençon était ainsi accusé d’avoir voulu faciliter le retour des Anglais dans le royaume en leur ouvrant les p...

L’hérésie médiévale est considérée comme un phénomène qui connaît une renaissance au xie siècle. Pourtant, après les conciles œcuméniques et les grands affrontements entre catholiques et « hétérodoxes » au cours des premiers siècles du christianisme, l’hérésie n’a pas disparu de l’horizon des hommes du Moyen Âge : les moines la côtoyaient quotidiennement, en copiant et lisant les écrits patristiques, imprégnés de références aux hérétiques. En lisant et méditant les textes anciens, pénétrés de...

Une autre approche fut favorisée dans un second temps. Elle s’appuya sur des écrits de nature variée : des œuvres historiographiques, hagiographiques et liturgiques, des lettres, des textes normatifs, des traités polémiques et des actes de la pratique, élaborés entre la seconde moitié du xe siècle et la fin du Moyen Âge au sein d’établissements ligériens ou bien reçus par eux, tous témoins de l’insigne pluralité de la production écrite d’origine monastique. L’écrit fut considéré tour à tour c...

Aux xie et xiie siècles, la production écrite des établissements monastiques de l’ouest de la France se caractérise par la rédaction de notices très narratives, à la composition parfois complexe, riches de détails sur les relations entre les religieux, auteurs de ces lignes, et leurs partenaires laïcs et ecclésiastiques. Pour autant, chaque établissement rédigeant ses écrits, il est légitime de poser la question des caractères propres de ces productions d’établissement. Passer de la lecture d...

Les recherches récentes sur l’hérésie situées dans la continuité des travaux de Monique Zerner, notamment la thèse d’Uwe Brunn, ont montré qu’une des difficultés pour retracer l’histoire des hérésies médiévales tient à la forte influence des textes patristiques. C’est en effet dans l’Antiquité tardive que s’est formée une série de stéréotypes, de logiques discursives et de catalogues que les clercs médiévaux utilisent pour comprendre, combattre, voire « inventer » les hérésies de leur temps. ...

La présente contribution est née du projet d’étudier le corpus des décrets pontificaux relatifs à la sorcellerie au xve siècle afin d’examiner les conceptions mobilisées pour désigner cette dernière, et plus largement les arts magiques, les invocations des démons et les sectes démonolâtres. Si elle s’inscrit à l’évidence dans le prolongement des questions relatives à l’assimilation normative de la magie et de la sorcellerie à l’hérésie, initiées au début du xive siècle, elle vise surtout à sa...

Les actuelles régions Bourgogne, Pays de la Loire et Centre possèdent des fonds documentaires d’une richesse peu commune pour les ixe-xiie siècles, et cela à l’échelle même de l’Europe médiévale. L’évocation de Cluny, Marmoutier, Saint-Florent de Saumur, Saint-Bénigne de Dijon ou encore Saint-Benoît-sur-Loire, suffit d’ailleurs à signifier que nous sommes ici au cœur de réseaux monastiques anciens et déterminants. Pour autant, si les institutions de ces espaces ont produit des actes en masse,...

Ni la simoniaca heresis, ni la figure de Simon le Magicien ne sont des sujets neufs. La première a attiré l’attention de deux spécialistes d’histoire de l’Église, Jean Leclercq et Giovanni Miccoli, dans les années 1940. Leur objectif était de comprendre comment cette expression, bien attestée en particulier à partir de Grégoire le Grand au tournant des vie-viie siècles, avait été surinvestie par les réformateurs à l’époque grégorienne pour condamner certaines pratiques relatives à l’obtention...

Dans le cadre de ma thèse consacrée aux usages de l’écrit diplomatique par les moines de Saint-Florent de Saumur et de ses prieurés, j’ai notamment été conduit à me pencher sur la question des pancartes. En effet, à l’instar d’autres établissements bénédictins de la vallée de la Loire telles que les abbayes de Saint-Aubin et Saint-Serge à Angers ou de Marmoutier près de Tours, l’abbaye Saint-Florent de Saumur dispose d’un fonds d’archives d’une grande richesse documentaire qui représente un v...

La poursuite des hérétiques et de leurs partisans, à l’image d’autres formes de justice, soulève des enjeux financiers parfois importants. La question de l’usage que les inquisiteurs ont pu faire de l’accusation d’hérésie, du profit qu’ils ont parfois tiré des confiscations et des amendes qui en découlaient ou, plus largement, des marges de manœuvre et de la latitude dont ils disposaient dans l’exercice de leur charge nous conduit, je crois, au cœur de la réflexion engagée dans ce volume auto...

L’un des rares manuscrits issus du scriptorium de l’abbaye du Bec (BnF, lat. 2342) contient un traité presque complet sur la « Profession des abbés » rédigé par un moine anonyme vers 1136-1138. Ce dernier s’indigne que les évêques exigent de l’abbé la prestation d’un serment écrit d’obéissance, ce qui revient à monnayer de façon simoniaque la « consécration » abbatiale. Pour condamner ce détestable usage également présent à Marmoutier, l’auteur s’appuie sur l’autorité du pape Urbain II : « Il...

Dans les écrits orléanais du ixe au xiie siècle, la mort en exil de Théodulfe, évêque d’Orléans déposé en 818 à l’occasion de la révolte de Bernard d’Italie, a donné lieu à un certain nombre d’éléments légendaires dont l’aboutissement se trouve dans la seconde version de l’Histoire ecclésiastique composée par Hugues de Fleury en 1110 : « Brillait aussi à cette époque Théodulfe, abbé de Fleury et évêque d’Orléans. Parce qu’il avait été accusé de nombreux crimes auprès de l’empereur Louis, il f...

L’emploi du terme « prieuré » par les historiens pour désigner un établissement monastique de taille modeste qui dépend directement d’une abbaye est avant tout motivé par une finalité utilitaire et normative. En effet, le terme latin prioratus ne s’impose progressivement dans les sources qu’au cours des xiie et xiiie siècles. Cette réalité déjà soulignée dans des travaux précurseurs au cours des années 1980 a été depuis vérifiée pour l’Ouest français par les analyses de Sébastien Legros pour ...

Assurément, les écrits produits par les communautés monastiques sont diversifiés car leur contexte de rédaction et leurs objectifs sont pluriels, leurs fonctions et leurs enjeux variés. Une même production peut par ailleurs répondre à plusieurs propos : le cartulaire être à la fois un outil mémoriel et un instrument de gestion ; la vita être une biographie spirituelle rédigée pour entretenir la mémoire et le culte d’un saint et aussi, ponctuellement ou durablement, pour défendre et accroître ...

Sunt numero Maximinus prior atque secundus, Euspicius, Theodemirus, simul et Leobinus, Dulcardus, Letus et Agilus, sit Phambaldus, Additur Urbicius, Senardus, Avitus, Amator, Karilephus sit eisque Pavacius atque Viator. Suntque Leonardi duo, sit Contan-que-cianus [sic], Sit Rigomarus eis, Launomarus atque Liphardus. Quos omnes sacra religio probat atque rependunt Menia regali fabricata munere dudum. Cette liste versifiée de vingt-deux saints personnages qui sont censés avoir illustré l’abbaye...

L’écrit produit par les institutions monastiques du Val de Loire du xe au xiiie siècle est abondant et pluriel. Dans les fonds d’archives, les chartes écrites sur des feuilles de parchemin ou réunies dans des cartulaires, les chroniques et les gesta, les annales, les traités de nature diverse, les lettres, etc., en témoignent à l’envi. Cette richesse a fréquemment été constatée et la documentation ligérienne souvent convoquée par les spécialistes de l’écrit et de la vie culturelle. Or, depuis une trentaine d’années, les travaux consacrés à l’écrit dans tous ses états ont largement renouvelé les connaissances sur les formes, les enjeux et les acteurs de la production écrite. Ils ont souligné le lien entre écrit et mémoire, écrit et stratégie de communication. Ils ont montré avec bonheur les processus de production et de transformation des écrits. En outre, la constitution de bases de données numériques a également offert aux chercheurs l’opportunité de brasser une documentation plus large et de mener des enquêtes comparatistes. Dans ce contexte scientifique fécond et dynamique, qui invite à un retour aux sources, il est bienvenu de porter un regard neuf sur le vaste corpus ligérien. Deux approches sont privilégiées. L’une vise à mieux évaluer la singularité de l’écrit élaboré dans le Val de Loire et à comparer les productions des différentes institutions ; l’autre cherche à identifier des réseaux de lettrés, à saisir les transferts culturels afin de mesurer l’influence de l’espace ligérien comme aire de diffusion et de réception des productions culturelles.

L’histoire de l’hérésie médiévale a sans nul doute constitué l’un des champs d’étude les plus profondément renouvelés au cours de ces trois dernières décennies. Il fut un temps, antérieur aux années 1980, où cette histoire se confondait assez largement avec celle des hérétiques, laquelle se résorbait souvent dans l’étude des marginaux. L’hérésie était alors volontiers appréhendée par les historiens comme la résultante d’un choix plus ou moins conscient, à l’échelle d’un groupe ou d’un individ...

L’Aquitaine du haut Moyen Âge pâtit d’une mauvaise réputation historiographique. Bernard Guenée a même écrit que « le réseau des centres historiques y était bien moins dense qu’au nord de la Loire, et surtout au nord de la Seine. Fragile, la culture historique de l’Aquitaine était aussi originale en ce sens qu’elle comptait assurément des œuvres de diffusion restreinte qui lui restaient propres ». Parmi les arguments usuellement avancés pour soutenir cette thèse figure celui selon lequel les ...

L’objectif de la présente contribution est d’évaluer la proximité et la différence entre les actes écrits produits en Normandie et ceux qui l’ont été dans les pays de la Loire, et de proposer quelques observations et quelques hypothèses sur les éventuelles influences documentaires qui ont pu exister entre ces deux espaces, entre le xie et le xiiie siècle. Nous appelons ici « pays de la Loire » ou « espace ligérien », dans une formule à certains égards contestable (sous l’angle de l’hydrograph...

Arnobe le Jeune († vers 450), dans son commentaire au psaume 103, décrit les chrétiens qui haïssent leurs frères dans la foi en recourant à l’image du fauve menaçant : ces chrétiens pervertis ressemblent aux Juifs et aux hérétiques, qui, comme des bêtes sauvages, fuient la lumière du jour et dorment cachés dans leurs tanières. Ils sont ainsi caractérisés par la même distance à la foi, fruit de la négation du Christ et de l’erreur, et par le même sommeil de la raison. En ces quelques lignes, A...

En 1996 paraissait un ouvrage dédié entièrement aux signes graphiques et dirigé par Peter Rück dont les travaux en la matière sont bien connus. Les chrismes et les invocations symboliques ont fait dans ce cadre l’objet d’études ciblées et d’approches complémentaires. Par la suite, des auteurs leur ont consacré des analyses particulières. Certains les ont observés afin de caractériser une production diplomatique, celle d’un souverain ou d’un notaire à son service, car ces signes peuvent revêti...

Nombre d’accusations formulées contre les contestataires de l’Église du Moyen Âge portent sur un fondamentalisme évangélique qui rejette l’institution ecclésiale et ses traditions. Des communautés religieuses, vraisemblablement d’inspiration apostolique, sont ainsi dénoncées depuis l’an Mil en Italie, en France, dans les Flandres et en Rhénanie, mais aussi dans l’Orient balkanique. D’autres accusations sont en revanche directement issues de débats théologiques portant sur la christologie et l...

À l’occasion du douzième anniversaire de la mort d’Alcuin, abbé de Saint-Martin de Tours entre 796 et le 19 mai 814, un colloque international s’est tenu à Tours en mars 2004 ; quelques mois plus tard en juin, à Orléans et à Saint-Benoît-sur-Loire, une seconde manifestation scientifique a mis à l’honneur un autre grand lettré, Abbon écolâtre et abbé de Fleury mort le 12 novembre 1004. Du 12 au 15 octobre 2016 en la ville de Tours, un colloque international a été organisé ayant pour thème la «...

En 1311, le concile de Vienne adopte un canon, le vingt-neuvième, connu sous le titre d’Ex gravi, par lequel il fustige le laxisme des gouvernements urbains vis-à-vis de l’usure. En conséquence, le concile ordonne aux inquisiteurs et aux évêques de poursuivre « comme ceux qui sont diffamés ou soupçonnés d’hérésie » et de punir « comme s’ils étaient des hérétiques » ceux qui « affirment obstinément que l’exercice de l’usure n’est pas un péché ». Avant cela aucun article de droit canonique n’a ...

À lire ou parcourir les sources du Moyen Âge européen (ve-xve siècle), l’impression domine que les hérétiques sont partout, y compris et peut-être surtout aux marges des royaumes, des cités et bientôt de la Chrétienté. Répertoriés comme tels depuis le ive siècle, les Bonosiens et autres Photiniens seraient ainsi toujours implantés, aux lisières du royaume franc, dans l’espace jurassien au viie siècle ; d’autres hérétiques d’origine africaine et d’affiliation « manichéenne » perdureraient en I...

Ces deux jours de travail, denses et conviviaux, ont mis à l’honneur l’« écrit monastique », expression dont la latitude sémantique s’est avérée chemin faisant plus opératoire que gênante. Ainsi l’éventail documentaire a-t-il été largement ouvert, le premier jour étant plutôt dévolu à la documentation diplomatique, le second à l’historiographie et aux productions dites littéraires. L’écriture exposée – entendons ici l’épigraphie – n’a pas été oubliée (Estelle Ingrand-Varenne pour l’abbatiale ...

cabarast, cabarastz, cabarat : cabaret ; « plusieurs estrangiers suspitionnez de briganderie et aultres delictz s’estoient ramagez en ceste cité et se tenoient aux estuves, bordeau et cabaratz » (Besançon, 1545) ; « aux hostelleries et cabarastz pour faire entendre aux hosteliers et cabaratiers qu’ilz doibgent reveler » (Dole, 1572) ; « Claude Roubert (...) on luy a permis de tenir cabarat » (Dole, 1610) cabasse : le mot correspond peut-être à la macre, appelée aussi châtaigne d’eau ...

uberté : fécondité, abondance umble : humble umbrage : ombrage ; voir aussi nouhier umbre : ombre (poisson de rivière) ; « truictes et timbres inumérables et les meilleurs du monde » (Orchamps, Vennes, 1564) ung : un unze : onze urinaulx : urine ; « interdit de non [sic !] gecter urinaulx par les fenestres » (Salins, 1567) us, usance : usage, utilisation ; « a us de vigne » (Châtillon-le-Duc, 1661) vaccé : vide vahain, va...

sac : un sac de toile, vide, pour mettre du grain, pèse environ 800 grammes (Dole, fin XVIe siècle) safrenier : de safran ? ; « une maison de pierre couverte de paille ensemble en curtil safrenier et court devant » (Vincelles, 1555) saige : sage ; « personnes des plus anciens et saiges » (Poligny, 1525) saigle : seigle sailier : grenier à paille, grenier à foin ; « se mect le feug au sailier d’une estable rue du sac » (Dole, 1599) ; ce mot ne semble pas dés...

quaignol, caignol, caingnol : gâteau, pain au lait ; « trois quartes de froment pour les caignols de Noël » (Montbéliard, 1534) quantes, quantes fois, quantefois, quanteffois : autant, autant, toutes les fois que ; « les habitans seront tenuz de a quantesfois que besoingt sera ayder a faire toutes fortiffications » (Pesmes, XVIe s.) quanton : canton, lieu ; « Jaques Barbier et ses consors perriers ont faict la vuydange d’une toise trois quars a ung aultre quanton de perriere...

tabellion : notaire, garde-notes ; en Franche-Comté, les mots « tabellion » et « notaire » sont souvent synonymes mais il semble que le mot « notaire » traduise plutôt la compétence et le mot « tabellion » la fonction tabourier : joueur de tambour tabuter : frapper à la porte (Plénise, 1546) tache, tâche, taiche : le travail « à la tâche » est difficile à saisir car il ne s’oppose pas forcément au travail à l’heure ou à la journée ; Jehan Evrard, toitot, a une amend...

fabricien : qui gère la fabrique, les biens de la paroisse ; « prodhommes eschevins et fabriciens » (Pesmes, 1555) ; équivalent de marguillier ; voir aussi fabricque fabricque, fabrique, frabrique : « doit deux gros de cense paiables a ladite fabricque le jour de Sainct George » (Pesmes, 1560) ; « donne en aulmonne a la frabrique de Pesmes pour faire celebre les messes votives » (Pesmes, 1570) ; voir fabricien fabve : fève faceonnerie, façonnerie : fabrication, travail ; « f...

Madame : appellation donnée aux femmes, dont l’usage est interdit « si elles ne sont femmes ou vefs de marquis, contes, vicontes, barons (...) ou si leurs marys n’ont été créez chevaliers » (Dole, édit du 20 juillet 1626) ; voir aussi dame, damoiselle macle : voir mascle magistrat : conseil de la ville, municipalité ; « pour obtenir nouvelle forme en l’election du magistrat de laditte ville » (Salins, 1612) maicle, mecle, mécle : méteil, c’est-à-dire mélange de céré...

naguieres : naguère nailer : noyer ; « cinq buches comme de nailer » naiser : voir nasir nantille : lentille ; « pois, nantilles » (Gy, 1644) nasir, naiser, nayser : rouir le chanvre ; « le droit de faire naiser leur chenesves en la rivière (...) ; nayser ou faire nayser » (Chamblay, 1609) ; voir chenesve nau : bateau, barque ; voir navoi navette : 1) variété d’un chou-navet dont les graines donnent de l’huile ; « abondante en navettes pou...