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Loin d’être le seul des principes reconnus dans la région, le duc partageait l’avant-scène avec plusieurs groupes de seigneurs qu’il rencontrait à l’occasion de ses descentes et avec lesquels étaient noués des liens féodaux. Or, depuis les articles de Ch. Higounet la connaissance des seigneuries de la Gascogne bordelaise a inégalement avancé. Sa carte sur les principales seigneuries du Bordelais à la fin du xie siècle à partir du cartulaire de la Sauve-Majeure fait toujours autorité quoique n...

De la pièce dont nous avons présenté les acteurs et le décor, il faudrait aussi connaître l’intrigue. Si l’on s’en tient aux ressorts individuels exprimés dans les actes des cartulaires, principalement religieux, c’est à la nature des liens entre Église et laïcs qu’il faudrait consacrer le chapitre qui s’ouvre. Pour notre part, nous nous intéresserons à ce par quoi étaient déterminées les relations sociales au sein de la société des laïcs, à ce qui, donnant à chacun des groupes un semblant de...

Bien éclairée par les cartulaires ecclésiastiques à partir des années 1070-1080, la société du Bordelais offre une organisation des pouvoirs particulière. Cette étude montre que la figure ducale, habituellement minorée par l’historiographie, peut être réévaluée. À la tête d’un domaine dont l’emprise territoriale est reconstituée, dominant un tissu seigneurial marqué par des seigneuries locales et des seigneuries châtelaines ne lui portant pas ombrage, le duc d’Aquitaine reste dans cette partie de la Gascogne, en dépit de ses absences, une figure majeure. La paysannerie libre y est importante. Le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt change la donne (1152). Dans les décennies qui suivent, le roi d’Angleterre et son fils, Richard Cœur de Lion, engagés dans de fréquents conflits, imposent un renforcement de leur autorité par l’introduction de nouvelles coutumes féodales, le relèvement de la fiscalité et par le biais de la paix du roi. Les liens sont renforcés avec l’aristocratie, nettement militarisée, ainsi qu’avec les communautés, requises au service militaire ou associées à la perception des revenus publics. Les années 1180 marquent l’acmé de ce premier temps du roi-duc.

Totz los vezis appel senhorsDel renh on sos joys fo noyritz,E crey que.m sia grans honorsQuar ieu dels plus envilanitzCug que sion cortes lejau Jaufré Rudel Des premières donations de Guy Geoffroy en Bordelais au statut de paix de Richard Cœur de Lion, la période couverte par cette étude, un gros xiie siècle englobant en amont le dernier quart du xie, a permis par son étendue d’observer des permanences et des mutations des pouvoirs, au sein de la société des laïcs de la Gascogne bordelaise. ...

Pour comprendre la portée des dispositions de la paix de 1198, pour saisir les enjeux du dialogue qu’elle consacre avec la société régionale, il nous faut revenir vers les groupes sociaux que le détour par l’histoire politique nous a contraint à délaisser un temps. Si l’on sait quels étaient les “barons, chevaliers et prud’hommes du pays” associés à l’élaboration de ces dispositions, il nous faut comprendre comment les groupes sociaux, que la paix reconnaissait et dont elle intégrait une part...

La société des laïcs Dans nos représentations de la société féodale, celle des xie et xiie siècles, les chefs des principautés, comtes et ducs, n’occupent pas la place d’honneur. Coupables d’avoir dépossédé la royauté de ses prérogatives régaliennes aux ixe et xe siècles, ils n’ont pas eux-mêmes su juguler la prolifération des pouvoirs locaux au profit d’une multitude de seigneuries ayant privatisé l’autorité publique. Entre autres symboles de ce recul, le meurtre du comte de Gascogne par Ra...

Stratification et complexité ; dès lors que l’on tente d’appréhender la société médiévale ces deux évidences s’imposent. Avec la grande variété de termes se rapportant aussi bien à l’aristocratie qu’à ceux qui ressentaient sa domination, le lexique des scribes nous interroge sur les fondements des distinctions sociales et sur leurs implications éventuelles avec l’architecture des pouvoirs. Ces réflexions prennent place dans une approche renouvelée des taxinomies que les scribes reprennent par...

La société qui se dévoile lorsque les textes commencent à percer la pénombre documentaire est portée par une croissance dont Ch. Higounet, avec les artigues et les sauvetés, a pointé les principaux effets tout au long des xie et xiie siècles. Elle est dominée par ceux que les scribes appellent principes, c’est-à-dire le duc et l’aristocratie laïque. Or, pour l’historien, les maîtres du pays restent de grands inconnus à propos desquels courent quelques idées reçues érigées en acquis par l’auto...

Le 18 mai 1152, deux mois après l’annulation de son mariage avec le roi de France, Aliénor, duchesse d’Aquitaine, épousait, dans la cathédrale de Poitiers, le duc de Normandie, comte du Maine et d’Anjou, Henri Plantagenêt, de onze ans son cadet. Le 25 octobre 1154, à la mort d’Étienne de Blois, Henri devenait roi d’Angleterre. L’événement avec lequel nous franchissons le milieu du xiie siècle fit entrer le Bordelais et la Gascogne maritime dans l’orbite des rois d’Angleterre pour trois siècle...

Les registres de délibérations communales italiennes de la fin du Moyen Âge, désignés par les termes de riformanze, reformationes ou consilia, éclairent de très nombreux aspects de la vie quotidienne d’une commune. L’incipit annonce leur contenu : « de nombreuses écritures variées et diverses » (multas scripturas varias et diversas). Cette précieuse documentation permet donc d’étudier non seulement la manière dont se déroulent les décisions politiques, la composition des conseils, l’électi...

Le 26 août 1789, une « Assemblée des représentants de la Commune » se réunit à l’Hôtel de Ville de Montpellier dans le but de représenter les citoyens et « régénérer » la vie municipale. Elle établit pour cela un règlement qui, dans son article 6, accorde aux six consuls déjà en charge au Conseil de Ville « une place distinguée avec une voix pour chacun dans les assemblées ». De rupture révolutionnaire, il n’est donc pas question au moment de l’instauration d’une dualité administrative,...

Introduction Le problème du recours aux exceptions et aux dérogations à la législation existante, pour faire face à une situation de crise, est un thème nouveau dans les études médiévales italiennes. Les premières analyses ponctuelles sur la question, réalisées entre 2007 et 2010 par Giuliano Milani, Sara Menzinger et Lorenzo Tanzini, ont montré que cette pratique était largement répandue. Néanmoins, la possibilité d’une instabilité du système juridique en raison de l’utilisation persistante ...

Les registres de délibérations suivent souvent deux logiques contradictoires : d’une part, la recherche de l’efficacité politique, de l’ordre urbain et même d’un entre-soi confortant le pouvoir de l’oligarchie urbaine, d’autre part le souci du bien commun, un esprit de justice prenant en compte les voix discordantes, y compris celles qui pourraient menacer gravement l’ordre social et mettre en péril l’honneur urbain. Au fond, c’est la quête du consensus qui anime la plupart de ces Conseils q...

Marseille dans les années 1540 est une ville en pleine expansion économique et démographique. On estime qu’en 1481, au moment du rattachement de la Provence au royaume de France, la population comprend entre 10 000 et 12 000 habitants pour atteindre un peu plus de 35 000 habitants vers 1550. Trois éléments montrent que cette croissance est particulièrement soutenue durant cette décennie. Tout d’abord, on passe de 154 offices municipaux à pourvoir lors des élections du 28 octobre 1543, à 251 l...

Le présent ouvrage est issu d’un travail collectif portant sur les registres de délibérations, développé autour de quatre rencontres scientifiques à la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme, à Aix-en-Provence. Alors que la première journée d’études, en novembre 2016, examinait cette documentation spécifique en Italie et dans le Midi français durant les xiiie‑xve siècles, les débats amenèrent peu à peu à élargir la perspective vers l’époque moderne et le reste de l’occident européen, ...

Lorsqu’en 1509 la commune d’Erfurt fut traversée par des divisions sanglantes entre différents partis – partisans du seigneur archevêque, partisans du duc de Saxe voisin, partisans des libertés de la commune – qui se disputaient aussi l’influence au sein du Conseil, l’un des enjeux de la lutte fut la maîtrise des écrits portant traces des décisions urbaines : ainsi les envoyés de l’archevêque de Mayence s’emparèrent-ils dès que possible des clés des portes, boîtes et armoires, et prirent da...

Une analyse préliminaire des sources émanant du processus de décision des municipalités catalanes de la fin du Moyen Âge révèle l’existence de certains points communs, mais aussi un certain nombre de caractéristiques divergentes. En faisant porter notre attention sur les registres de Barcelone et d’autres villes, nous visons à présenter les grandes lignes de cette documentation et à proposer certains modèles. Dans ce but, nous commencerons par contextualiser et décrire les registres des gouve...

Le gouvernement collectif et la délibération des conseils sont considérés comme des points distinctifs majeurs des institutions communales dans l’Italie médiévale. Plusieurs chroniques et libri de regimine rappellent cette spécificité. L’importance politique de la pratique oratoire est parallèlement pointée par les manuels de rhétorique et les recueils de discours qui se multiplient dans cet espace à partir de la seconde moitié du xiiie siècle. Les sources statutaires rappellent quant à elles...

Introduction Un siècle et demi environ : en Rouergue, c’est la durée qui sépare l’apparition des consulats urbains de ce qui a été identifié comme les premiers registres de délibérations, c’est-à-dire les documents dans lesquels les consuls consignaient les décisions prises dans le cadre de l’exercice ordinaire du gouvernement urbain. À la fin du Moyen Âge, le Rouergue est une région d’assez petites villes, les plus importantes comptant, dans la première moitié du xive siècle, de 4 000 à 8 0...

Pas plus qu’en histoire médiévale les délibérations consulaires n’avaient été l’objet d’un grand intérêt de la part des historiens modernistes – méthodologiquement parlant, bien entendu – lorsque, il y a vingt ans, nous nous sommes penchés sur celles de la petite ville de Mèze, en Languedoc, entre la fin du xviie siècle et la Révolution française. Un ensemble de considérations formulées au sujet de la matérialité de la source ont alors permis d’en tirer des conclusions probantes quant à l’ins...

Dans le sillage de la nouvelle histoire diplomatique, la politique étrangère des villes a suscité ces dernières décennies l’intérêt accru des historiens des relations « internationales ». C’est cependant surtout à travers les sources classiques de l’histoire diplomatique, par exemple la correspondance de ces villes avec les puissances étrangères, ou encore les instructions dont étaient munis leurs représentants, que ce rôle a été étudié. Les historiens se sont également penchés sur la maniè...

Tous, en même temps, de manière unanime et en accord, dirent et répondirent aux dits seigneurs officiers qu’ils ne paieraient pas. Le 14 juin 1355, les Niçois, en assemblée, refusèrent de s’acquitter d’une taille de trois blancs d’argent demandée par Guillaume Augerii de Forcalquier, lieutenant du sénéchal de Provence. Cette imposition avait été établie par les états de Provence, réunis en mai à Orgon, afin de reprendre les Baux. Lors de la présentation de la lettre de Guillaume Augerii au j...

Le présent ouvrage est issu, pour la plus grande part, d’un colloque tenu à Aix-en-Provence les 13 et 14 juin 2019, ayant pour titre « La voix des assemblées. Quelle démocratie urbaine au travers des registres de délibérations ? Méditerranée-Europe, xiiie-xviiie siècle ». Le thème retenu proposait une réflexion sur la possibilité d’une voix du peuple, trouvant son expression dans une scripturalité propre, parole et écriture reflétant à leur manière la pratique d’une forme de démocratie, « ...

À l’heure où les formes de la démocratie représentative sont interrogées de différentes manières, que peuvent nous apprendre les expériences de délibération communale développées au sein des communautés urbaines médiévales et modernes ? Les registres de délibérations forment un corpus très abondant depuis la fin du Moyen Âge. Leur production, en Europe méridionale puis occidentale, a accompagné le développement des formes écrites de l’administration. Or, à l’échelle du gouvernement des sociétés médiévales et modernes, les écritures des conseils de ville permettent de pénétrer les processus de la prise de décision. Les études ici contenues interrogent la diffusion et l’adaptation locale des cultures politiques européennes. Elles prolongent les avancées les plus récentes de la recherche sur le pouvoir de l’écrit, sur un terrain nouveau. Il s’agit ici de la première synthèse sur les sources historiques sans doute les plus abondantes et les plus continues en histoire urbaine. Apparemment banals, les registres de délibérations ont été jusque-là utilisés par les historiens sans y prêter toute l’attention qu’ils méritaient. Cet ouvrage mutualise les approches méthodologiques. Le collectif de chercheurs réunis forge ainsi les outils d’un comparatisme européen, à l’échelle urbaine. La perspective choisie est celle de la longue durée, en examinant l’évolution politique et scripturale des institutions municipales du XIIIe au XVIIIe siècle.

Et si, une fois n’est pas coutume, nous tentions de prendre au sérieux, sans la balayer d’un revers de main, la question iconoclaste posée par François Otchakovsky-Laurens et Laure Verdon en nous demandant vraiment, sérieusement, réellement s’il est possible de percevoir les signes tangibles « d’une démocratie urbaine au travers des registres de délibérations » ? Question quelque peu iconoclaste tant de nombreux travaux semblent y avoir d’ores et déjà apporté une réponse définitive en les ...

Les registres de délibérations de la moitié nord de la France ont été abondamment utilisés pour écrire l’histoire des municipalités qui les ont produits. Pour certaines villes, ils forment des séries conservées de manière continue, sur de longues périodes, parfois depuis le xiiie siècle, jusqu’au xxie siècle. Cette caractéristique leur a conféré une place de choix dans les études historiques et une présomption de stabilité de ce genre documentaire dans la longue durée. Lorsque l’histoire muni...

Introduction Malheureusement, bien peu de villes du royaume de Naples conservent des séries de registres de délibérations relativement riches. Entre les plus anciens fonds, rappelons ceux de deux cités royales, seconde et troisième villes du Royaume par importance : L’Aquila, dans les Abruzzes, et Capoue, en Campanie. Ils débutent pareillement en 1467. Il est cependant probable que de nombreuses universitates urbaines et rurales du Royaume mirent par écrit leurs décisions à partir de la fin ...

Introduction Les procès-verbaux des conseils urbains permettent de connaître en détail les modalités de la communication politique. La présente étude se focalise sur la communication épistolaire avec l’extérieur de la ville, dans le but de mettre en lumière les caractéristiques de son usage et ses relations avec les conseils des villes italiennes sur une période assez longue, du xiiie au xve siècle. La question de l’utilisation de l’écriture est un thème largement développé dans les études su...

L’étude systématique du fonctionnement politique des villes de la Couronne de Castille commence dans la première moitié des années quatre-vingt-dix du siècle dernier, et ceci dans un contexte très particulier. À cette époque, l’université espagnole augmente de manière significative l’effectif de son corps enseignant. C’est à ce moment-là que les archives municipales ont commencé à être systématiquement étudiées et qu’une série d’études monographiques sur la structure institutionnelle et la dy...

Il serait difficile de parler en général de la documentation écrite et de l’histoire politique de l’Italie communale. On peut dire qu’il n’y a aucune typologie documentaire qui n’ait été profondément exploitée par les études sur les villes italiennes : les statuts, les sources judiciaires, les écritures fiscales, les libri iurium plus récemment les délibérations des conseils ou les lettres de la correspondance publique – un patrimoine d’études énorme. La fonction de la parole écrite est au c...

Pendant des décennies, l’historiographie consacrée aux pluies acides a négligé l’Europe de l’Est, bien que l’URSS ait joué un rôle prépondérant dans la construction de la convention de 1979 sur la pollution à longue distance. Elle n’a guère abordé les débats scientifiques, car l’histoire des pluies acides doit être associée à la construction d’une discipline scientifique : la chimie de l’atmosphère. Dans ce cadre, prendre la RDA comme sujet, c’est se situer au cœur de la guerre froide. En eff...

En 1755, les relations entre la France et l’Angleterre sont particulièrement tendues, les Autrichiens et les Provinces-Unies craignent que les Pays-Bas soient à nouveau le théâtre d’affrontements entre ces deux puissances. Forts de l’expérience de la guerre de succession d’Autriche (1740-1748), le pouvoir central des Pays-Bas autrichiens et les États-généraux des Provinces-Unies s’accordent et se préparent à l’éventualité d’un siège de Namur. Une convention détaillant les dispositions prises ...

Les questions environnementales cristallisent des enjeux de pouvoirs comme le montrent les controverses actuelles autour du changement climatique, de la pollution de l’air, de la mise en péril de la biodiversité et de la transition énergétique. Depuis une quarantaine d’années, elles suscitent des mobilisations et font l’objet de négociations et d’oppositions à toutes les échelles. Or cette tendance récente s’ancre dans un passé plus lointain. Ce livre a l’ambition de montrer l’ancienneté et la richesse des liens entre pouvoirs institutionnels et environnement. Les quatorze contributions réunies ici interrogent les modalités de cette relation en balayant plusieurs siècles d’histoire sur trois continents (Europe, Amérique, Afrique). D’abord, les questions environnementales participent de l’affirmation des pouvoirs : les catastrophes naturelles et le surgissement des risques apparaissent comme des moments privilégiés de cette coconstruction. Ensuite, la définition de l’environnement constitue un attribut essentiel des institutions et des acteurs qui, pour défendre des milieux, sont parfois amenés à les politiser. À travers les aménagements et la gestion des confits, l’environnement apparaît enfin en tant que sujet de négociations et objet de jeux d’acteurs complexes au sein desquels les pouvoirs publics jouent un rôle souvent difficile, à l’interface entre des intérêts divergents.

L’histoire dite « maritime », qui conçoit dans leur globalité tous les faits liés à la mer, a connu des avancées considérables depuis l’après-guerre. Dans le sillage ouvert par le courant des annales, plusieurs grands médiévistes français s’étaient fixé pour cap d’aborder l’évolution des sociétés littorales au travers de leur vie matérielle et des facteurs de leur développement. Grâce aux travaux pionniers qu’ils ont conçus, puis à ceux de leurs disciples, nous percevons assez bien aujourd’hu...

Du Traité de Münster en 1648 jusqu’à la capitulation de Strasbourg en 1681, l’Alsace passe progressivement sous souveraineté française. Touchée par les nombreuses guerres du règne de Louis XIV, cette province frontière pose d’importants enjeux stratégiques. Les ingénieurs militaires, dont la structuration en corps au service de l’État a lieu précisément à cette période, tentent d’y répondre en s’appuyant sur l’environnement, et notamment sur un dense réseau hydrographique. De nombreux aménage...

C’est durant la seconde moitié du Moyen Âge que fut mis en place l’essentiel du dispositif portuaire de la France atlantique. Cette genèse s’inscrit dans le même rythme que les grands mouvements de croissance économique puis de crise qui ont marqué l’Europe occidentale à cette époque. Au cours des soixante dernières années, les médiévistes ont beaucoup étudié les sociétés littorales et avec elles les trafics, les marchandises et les navires, mais ils se sont peu préoccupés des espaces portuaires à partir desquels leurs activités étaient rendues possibles. Les cales et les quais, les bassins de stationnement, tous les dispositifs qui permettaient le service des vaisseaux sont passés sous leur regard, ce dernier restant fixé sur les horizons maritimes plus ou moins lointains du commerce et de la pêche. Les ports, considérés en tant que territoires à part entière et non pas comme de vagues appendices urbains ou de simples outillages du négoce, n’ont que très peu attiré l’attention. Il en va de même des efforts considérables consentis par les populations et les autorités publiques qui, face aux menaces d’érosion et d’envasement, ont voulu préserver les lieux dans lesquels les navires trouvaient refuge et par lesquels les denrées circulaient. Les ports sont en cela exceptionnels : ils ont parfois suscité, auprès de sociétés souvent enclines à renoncer devant la force des phénomènes naturels et des changements environnementaux, des réactions collectives de grande ampleur destinées à y résister. Fondé sur une somme significative de monographies produites depuis le xixe siècle, portant sur les agglomérations maritimes et les provinces littorales, ainsi que sur un corpus important de sources nouvelles tirées des archives centrales, cet ouvrage entend rassembler et organiser nos connaissances relatives aux ports du xie au xve siècle. C’est un tableau géohistorique qui présente une vue d’ensemble de la cartographie portuaire de l’époque, en référençant quelque 620 sites. Il fournit de surcroît, dans un but utilitaire, une somme d’informations et de faits nécessaires aux recherches qui sont et seront conduites à leur sujet.

Les petits ports du pays de Caux Le contexte environnemental qui préside à l’établissement de ports en pays de Caux est quant à lui dominé par d’imposantes falaises entaillées de plusieurs brèches creusées par de petits fleuves côtiers suintant du plateau. Elles constituèrent autant d’opportunités que saisirent les populations littorales, et ce souvent dès l’Antiquité. Il est possible d’en ressortir neuf des sources médiévales. Même s’il n’est pas explicitement désigné comme portus dans les t...

Les ports de la basse vallée de la Somme En cette zone, l’élection des ports a été en grande partie gouvernée par les évolutions sensibles de la topographie des estuaires, remaniée en permanence du fait de l’ensablement et du déplacement du cours de ces fleuves. Remarquons aussi immédiatement qu’ils connurent tous les trois une activité navale notable dès l’Antiquité. Au xixe siècle, la Somme commençait à être navigable en amont depuis Bray. Au niveau d’Amiens débutait le tronçon dévolu au se...

Les petits ports de la basse vallée de la Loire En ce qui concerne la Loire, l’exercice d’inventaire conduit à des conclusions assez proches de celles observées pour la Gironde et la base vallée de la Garonne : ni Nantes, ni Bordeaux, ne disposèrent d’avant-port à l’embouchure de leur fleuve. La pêche et la saliculture d’abord, le transport de produits agricoles ensuite, ont de la même manière stimulé la naissance de plusieurs lieux d’accueil pour les navires. S’agissant la Loire, les géograp...

Au cours des dernières années, plusieurs publications se sont intéressées au lieu commun selon lequel préoccupations environnementales et enjeux du travail constitueraient deux thèmes irréconciliables, en s’inscrivant dans la foulée d’une histoire environnementale influencée par les remarques pionnières de Richard White. Bien qu’elles érodent le postulat d’un antagonisme entre travail et environnement, ces études restent silencieuses quant aux causes de la persistance de cette tension dans le...

« Les termes de nature et de société ne désignent pas des êtres du monde, des cantons de la réalité, mais une forme très particulière d’organisation politique. » Les contributions réunies dans cet ouvrage se retrouvent autour d’une définition très large de l’environnement : cette amplitude est aussi la condition d’existence du Réseau universitaire de chercheurs en histoire environnementale (RUCHE), dans le cadre duquel a été organisé le colloque qui a réuni ces auteurs, à Rennes en octobre 20...

L’histoire comparée des parcs de Forillon, des Cévennes et du Simien révèle que depuis les années 1960, les États canadien, français et éthiopien façonnent la nature, dans ses dimensions institutionnelles, matérielles et symboliques, afin de faire voir et de faire croire à la nation. Ils modèlent une nature emblématique du temps et de l’espace de la nation, ils formulent un discours paysager à même de faire exister une expérience collective et ce faisant, ils offrent à la communauté un domain...

Les politiques d’aménagement du territoire incarnent une forme reconnue d’affirmation des pouvoirs par la transformation de la nature et l’anthropisation des milieux. Profondément ancrées dans la tradition classique et biblique, elles s’inscrivent dans une dialectique nature/culture convenue, où la seconde a pour vocation de domestiquer la première. L’association entre vigueur des pouvoirs et puissance des aménagements constitue ainsi une thématique historiographique majeure. En ce sens, les ...

La figure de la victime se trouve au centre de toute définition contemporaine de la catastrophe. Au niveau politique, le souci tout à fait central pour les victimes et la prise en charge immédiate de la détresse humanitaire définissent une forme de sensibilité et de mesure du bien commun dont l’historicité mérite d’être interrogée. À l’heure où la sociologie définit notre société comme une « société des victimes » ou une « société compassionnelle », c’est-à-dire comme une société dans laquell...

Les sciences humaines tendent à mobiliser les notions de risque et de catastrophe comme des paradigmes généraux capables d’interroger l’ensemble de la société. Confrontée à une crise écologique globale dont l’accident de Tchernobyl en 1986 a été une sorte de révélateur, et dont le réchauffement climatique est à l’heure actuelle l’expression la plus spectaculaire, les sociétés contemporaines prendraient peu à peu conscience de l’impact de leurs activités sur les écosystèmes et chercheraient le...

Au moment où l’humanité est confrontée à un changement climatique d’origine humaine d’une ampleur inédite, à tel point que certains chercheurs qualifient la période actuelle d’anthropocène, la capacité d’action et la légitimité des États à agir sur l’environnement sont remises en cause de toutes parts. Fragilisés par un contexte économique difficile et la financiarisation de l’économie, remis en cause par les ONG et les collectifs citoyens, les États siègent sur le banc des accusés tout en ét...

Les petits ports du Labourd Le long de la courte portion rocheuse de la côte gasconne, au pied du massif pyrénéen, avaient été fondées au moins cinq localités portuaires : Hendaye, Ciboure, Saint-Jean-de-Luz, Biarritz et Anglet. Voici la description de ce littoral que faisaient encore les services de l’amirauté à la fin du xviiie siècle : « C’est une côte herissée de rochers qui en rend le cours impraticable et l’approche très dangereux pour les batimens. Elle est heureusement coupée par l’ou...

« Plus l’environnementalisme est une force, plus il est sujet à la tentation du pouvoir » : cette assertion de Joachim Radkau prend tout son sens à la lecture de cette quatrième et dernière partie, dont la coloration vingtiémiste exclusive se justifie par la cohérence des problématiques liées au « tournant environnemental » des sociétés industrielles et post-industrielles. Une première lecture pourrait en être que la puissance publique se saisit de l’environnement pour construire ou imaginer ...

Les petits ports de la Gironde La Gironde, de la pointe de la Coubre jusqu’au bec d’Ambès, comprend environ 150 km de rives, auxquelles il faut ajouter pour notre étude les sections de la Dordogne et de la Garonne remontant jusqu’à Libourne et Bordeaux, soit un total de quelque 290 km. La documentation médiévale révèle l’existence d’une cinquantaine de ports, soit un tous les 6 km. Mais il y a tout lieu de relativiser ces chiffres, compte tenu de la quarantaine de sites supplémentaires identi...

La démocratisation de l’environnement comme objet politique se produit en France à partir des années 1960. Les défenseurs de l’environnement cohabitent alors avec les pouvoirs, qui affermissent eux-mêmes leur prise en compte de la question environnementale. Or, si les autorités invoquent la protection de l’environnement, les militants pointent souvent du doigt les responsabilités de celles-ci dans sa dégradation. En Bretagne, il leur est facile d’attribuer la pollution des eaux de surface ou ...