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Recherche et environnement de travail requièrent une architecture pouvant répondre à des diversifications et mutations programmatiques constantes. Les cloisonnements permanents des édifices sont abandonnés au profit d’une liberté spatiale basée sur un principe de flexibilité. Les chemins de fer ont sculpté les pentes lausannoises pour y façonner un plateau. Cette horizontalité trouve son épicentre avec la gare, qui devient tant une porte d’accès pour la ville qu’un lieu de rencontre entre le pôle culturel et les habitants. Le plateau qui accueille la proposition était autrefois la centrale de distribution des services postaux. Constituée d’un large complexe de bâtiments d’époques différentes, la forme du site témoigne encore aujourd’hui de l’empreinte laissée par les voies ferrées. Plateforme se présente comme une réponse envers cette instabilité programmatique. Une infrastructure autonome qui apparaît comme un bandeau métallique déposé sur une forêt de piliers en pierre massive. Ce disque s’installe sur le site en embrassant les anciens édifices de la poste tandis qu’il pénètre les bâtiments plus récents. L’ensemble forme alors un espace hétérogène et cohérent. La plateforme recouvre des terrasses dédiées à la culture du corps et à la dépense physique. Son intérieur, de par sa modularité et sa flexibilité, accueille des start-up lausannoises en émergence. Sa toiture, quant à elle, offre un belvédère public, un espace de détente et de contemplation destiné à la ville. Une rampe monumentale apparaît comme un organe sculpté par le rail, elle transperce et connecte l’ensemble du dispositif avec la future place de la gare.

Une dalle à la géométrie primaire, un disque élevé à 12 m de hauteur, un geste qui, d’une part, génère l’espace de l’événement, l’alter-ville, qui se détache du sol et, d’autre part, permet aux fonctions urbaines, tel que l’arrêt du tram, la place couverte pour le marché et les ateliers dédiés à la production artisanale et artistique, de s’installer au-dessous. Ce dispositif, affirmant cette dichotomie, offre aux flâneurs en quête d’expériences singulières une fugue vers le monde de l’événement et de l’instantanéité. Le plein, le podium, une structure inébranlable, sert de support pour celle qui aujourd’hui sera une tour de logements, un camping vertical urbain pour étudiants et artistes. Chaque individu aura la possibilité de louer une loge habitable à raccorder au réseau technique de la tour, à n’importe quel étage et pour n’importe quelle durée. Le vide est occupé par un dôme monumental renversé, une structure suspendue, en lévitation, qui contient un jardin édénique. La lumière caressant la surface réfléchissante du dôme rejoint le niveau inférieur. Les passants transitant au sol, fascinés par cette forme énigmatique, irradiée par les rayons du soleil, entreprendront l’ascension vers ce monde qui se détache de la rigueur de la ville. Cette structure héroïque veut exalter l’éphémère et l’événementiel. Une structure qui a la force de devenir la scénographie immuable pour une société en mouvement.

Ce projet s’inscrit dans la continuité d’un travail de recherche qui traitait de la thématique du revêtement en céramique à Milan dans l’architecture d’après-guerre. Il explore l’utilisation du matériau en tant qu’enveloppe mais également en tant que lieu d’expérimentation collective. Situé à NoLo, un quartier que la ville lombarde souhaite revaloriser, le laboratoire est un lieu de création comprenant une partie professionnelle destinée à la rénovation des revêtements présents à Milan ainsi qu’une partie atelier ouverte aux habitants du quartier. Il s’installe sur une parcelle bordée par le pont de la voie ferrée, à la place d’un vieux bâtiment industriel démantelé. Le bâtiment se divise entre extérieur et intérieur, entre peau et squelette. D’un côté, le corps principal est soutenu par une structure métallique sur lequel sont disposés les organes de circulation verticale ; de l’autre, l’enveloppe en céramique, détachée et légère, vient recouvrir cet intérieur comme pour l’habiller. Le projet s’étend aux et s’approprie les deux arcades sous le train pour en faire un espace d’exposition complété d’un café, ainsi qu’un magasin de céramiques. Grâce à sa polychromie, le laboratoire de céramique se distingue des bâtiments alentour et s’affirme comme objet emblématique du quartier.

Depuis l’émergence du Web, le monde digital envahit de plus en plus notre société, impactant nos façons de vivre et nos relations avec le monde environnant. Alors que les appareils intelligents ont intégré nos activités quotidiennes, les machines qui permettent leur utilisation demeurent un mystère pour la plupart d’entre nous. Dans le processus du traitement de 0 et de 1, une nouvelle typologie issue de ce monde invisible est née : les datacenters. Ils envahissent silencieusement nos villes et les impactent de manière tangible. Souvent anonymes, fermés, opaques et inaccessibles, ils ne révèlent rien des conséquences spatiales, environnementales et sociales de leur implantation, creusant l’écart entre le virtuel et le physique et empêchant ainsi toute forme de reconnaissance des conditions de l’ère du digital. D.A.T.A 225 cherche à répondre à cette problématique en détournant les installations d’un datacenter privé, au cœur de Zurich, au profit de la collectivité. Le projet spécule sur l’instauration d’un nouveau règlement pour la construction des gratte-ciel mis en place par la Ville et repose sur la volonté de créer un dialogue entre les installations techniques d’un datacenter réimaginé et l’architecture. Interrogeons cette technologie dont la présence invisible a des incidences manifestes sur notre société, détournons-la pour en faire un créateur d’ambiance et érigeons le datacenter en icône de la dimension du digital!

Par sa perte d’espace libre, le campus de l’EPFL est marqué par un ensemble de bâtiments hétéroclites. Avec sa dépendance fonctionnelle, il devient le réceptacle d’une vie partielle, cadrée par des horaires stricts. Stipulé comme point essentiel de l’université, la vie sociale n’est que partielle, prouvant une inadaptabilité du campus à accueillir ses dynamiques intrinsèques. Revenant à la définition du campus comme champ, le projet s’articule autour d’une surface unique. Il s’inscrit comme interface avec son contexte. Sa position est cruciale, au croisement des centres d’intérêt actuels de l’université tels que le développement économique, la recherche, l’enseignement et la vie étudiante. Se définissant comme un nouveau sol commun pour la foule universitaire, cette nouvelle surface devient réceptacle de fonctions non désirables du campus : lieux de vie associative, ateliers étudiants, loisirs, etc. Cette nouvelle proposition offre un équilibre en réponse aux activités proposées sur le campus, fondées sur le travail. Les espaces intérieurs, conséquents de cette surface permettent une adaptabilité sur le court terme, tout en gardant une identité forte sur une plus longue durée. Par l’usage de matériaux recyclés, le projet ouvre un dialogue autre qu’un simple rapport de bâti, mais aussi un échange constant de flux, matériel et social. Le projet illustre une nouvelle typologie de bâtiment possible pour le campus de l’EPFL, proposant un nouveau dialogue avec celui-ci.

« 120 BPM » se juxtapose à l’univers chaotique du Flon et absorbe son rythme effréné. Il capture le flux métropolitain assommé et aseptisé pour le plonger dans un monde pluriel. Comme une séquence de plateformes qui chorégraphient le mouvement et l’arrêt, la conception de scènes à la manière d’un théâtre s’étend au-delà du cadre traditionnel de la scénographie et fait du mouvement corporel le protagoniste absolu où chaque geste acquiert une solennité performative. La construction d’un nouveau sol transforme la circulation en un spectacle processionnel. Avec le battement du coeur comme unité de mesure, le projet construit le cadre du nouveau récit humain. Des scènes pour se regarder, se réunir, s’isoler, s’abandonner, s’embrasser, s’aimer, se différencier, se ressembler. Les logements sont la scène de la vie quotidienne, où chacun se montre ou se retire et devient également le spectateur de la vie urbaine, dans une tension créative constante entre le monde privé et le monde public. La toiture offre une autre plateforme à la ville, un espace de contemplation et d’action, insérée dans une nature luxuriante et bienfaisante. « 120 BPM » voit le chaos comme porteur de créativité et l’accueille en son coeur. Porté par l’utopie du beau pour tous, le projet valorise l’art dans une circuit infini de créativité, où le visiteur est lui même producteur d’art. La théorie du chaos, qui a su trouver de l’ordre caché sous le désordre apparent, a introduit la place du hasard; entre ordre et désordre, calme et excitation, le ciel et la terre. Les opposés cohabitent et s’augmentent par leurs présences antagonistes. Le projet s’exerce sur les territoires de l’imaginaire et crée de nouvelles fictions qui se mêlent à l’épaisseur du réel. Ce projet métaphorique contemporain pose le cadre d’un récit merveilleux et s’abandonne à l’imaginaire.

Le quartier de Malley possède une vaste aire qui change rapidement d’aspect et qui formait, il y a peu encore, un tissu industriel très diversifié. Aujourd’hui, des réflexions à propos du futur de Malley poussent à redéfinir cette zone jadis active. En effet, même si l’ancien site industriel constitue un patrimoine important aux yeux des habitants, la Ville a l’ambition d’en faire un nouveau quartier d’appartements et de commerce dense d’ici 2025. C’est à ce moment précis qu’intervient le projet Tortuga qui considère le vide actuel du site comme une forme sensible pouvant accueillir de nouveaux modes de vie urbains. Le déjà-là de cet espace disponible est alors une tension vers quelque chose, une dynamique vers une autre réalité que le rien ou le conventionnel ne peuvent offrir. Un grand parc-place se développe à partir d’un geste fort qui l’organise en séquence d’éléments dans lesquels émergent des mouvements divers mais clairement reconnaissables. Le niveau du sol est pensé comme une portion de terre performative dédiée aux événements, aux jeux, aux manifestations, à ce qui nécessite un déplacement intense des usagers. Puis, au-dessus de l’ensemble du projet, une grille de pilotis suspend une barre-hôtel vitrée. Cette dernière complète le programme en intégrant des installations pour vivre et travailler : des espaces alternatifs organisés comme des galeries linéaires à chaque niveau. Avec ses étagères habitées et sa généreuse tapisserie urbaine, Tortuga prône l’invention de nouvelles manières de structurer le temps privé et social par la multiplicité des rythmes individuels et collectifs.

Projet phare de la transformation de l’agglomération genevoise, le secteur Praille Acacias Vernets (PAV) est le futur centre urbain du grand Genève. Toutefois, le plan d’un des plus importants projets d’aménagement en Europe manque cruellement d’un dispositif culturel d’envergure. Le centre culturel pluridisciplinaire projeté s’installe au cœur du parc contigu à la place de l’Étoile, lieu de passage où se rencontrent les différents quartiers du PAV. Une peau extérieure enveloppe une structure pérenne composée de dalles en béton portées par des poteaux métalliques. Dans l’abri, des locaux secondaires chauffés viennent s’installer. Le projet assure une flexibilité des fonctions favorisant l’émergence de nouvelles formes d’expression artistique. Le jardin au cœur du dispositif et la situation du bâtiment dynamisent la participation du public. Traditionnellement, l’architecture filtre les désagréments extérieurs au moyen d’un mur monolithique. Le projet dilate la limite franche entre les phénomènes intérieurs et extérieurs. Ce dispositif consiste en un emboîtement d’enveloppes au fil desquelles la chaleur, le froid, l’humidité, le bruit, perdent graduellement de leur intensité. L’architecture proposée est une géographie où les climats varient. En hiver, la peau extérieure se ferme pour empêcher les courants d’air. En été, le système s’ouvre pour respirer. La limite entre l’intérieur et l’extérieur est définitivement brouillée quand l’ensemble des parois des locaux chauffés coulissent pour laisser entrer le jardin.

« Université d’architecture 2022 = atelier » Initialement conçu comme un lieu de travail, l’atelier cannibalise aujourd’hui le reste du campus. L’atelier est devenu l’espace pour discuter, manger, dormir, parler, dessiner, boire, danser, lire, traîner, apprendre, jouer, etc. « Université d’architecture 2022 = espace élitiste hors de la ville » Les universités d’architecture en Suisse sont situées hors de la ville, ce qui empêche les étudiants d’y être des acteurs actifs et les sépare de la vie métropolitaine. L’Université libérée d’Architecture de Berne caractérise un nouveau modèle d’éducation radicale en architecture. Située entre la gare centrale et l’espace autogéré de la Reitschule, elle marque le retour de l’éducation architecturale à la ville et de la ville à l’éducation en architecture. Assumant la dissolution complète de l’espace de l’atelier, le bâtiment prend la forme d’un contenant anonyme : une boîte recouverte d’une structure en acier standardisée et revêtue d’une peau sans signe distinctif. Son espace unique est divisé en bandes programmatiques, chacune composée d’un plancher équipé et d’un mur habité contenant des fonctions servantes. L’Université libérée d’Architecture de Berne déconstruit les standards actuels de l’éducation en architecture – et donc de la profession même de l'architecte – de la pédagogie jusqu’à la matérialisation du bâtiment.

S’interroger sur l’espace domestique c’est prendre en compte la relation duale entre l’individuel et le collectif. Dans ce projet, la stratégie proposée renonce donc aux pratiques conventionnelles du logement. Elle imagine des espaces qui ne définissent pas un sujet mais accommodent des modes de vies pluriels et en commun. Pour cela sont explorées autant l’échelle individuelle de la pièce que celle, plus collective, de la rue. Le choix de la ville cosmopolite de Berlin pour réfléchir à des formes de vie coopérative n’est pas seulement symbolique, il est également concret car les problèmes de logements y sont réels. La volonté de s’implanter dans un lieu à grandes disparités sociales comme Kreuzberg, combinée au choix de la parcelle, actuellement une surface sous-utilisée, s’inscrit dans une démarche d’intervention réaliste. Le projet repense la pièce comme l’association d’un sol avec des murs-armoires comprenant divers outils qui peuvent être activés librement par les occupants. L’agrégation de ces pièces sur des plateformes constitue une boîte habitable qui se pose sur une surface urbaine en intégrant des fonctions collectives pour le quartier. Les principes rationnels et durables de la boîte habitable se nouent à l’orientation de la surface urbaine qui évoque un Berlin disparu ; deux systèmes se rencontrent pour créer un ensemble qui dialogue entre un habitat alternatif et un projet pour la ville.

Le projet prend place au cœur de l’ancienne Brasserie du Cardinal à Fribourg. Fermée en 2012, l’entreprise fait partie de l’identité de la ville mais ne trouve pas de seconde vie. Aujourd’hui, la société BlueFactory est propriétaire et gestionnaire du site : technologie, innovation et spéculation immobilière sont les termes directeurs de son développement. L’objectif du projet est de contrer cette démarche spéculative qui fait du quartier un ghetto capitaliste fermé, en invitant la population à s’emparer de l’espace et plus particulièrement du silo, emblème de la skyline de la ville. Ainsi, le projet propose un espace destiné aux associations qui ont occupé le site depuis le départ de Cardinal et qui sont aujourd’hui dirigées vers la sortie. Du fait de la variété de leurs activités, celles-ci constituent un échantillon représentatif de la population de Fribourg. La multiplicité des programmes induit une utilisation permanente du silo et en fait un bastion de résistance populaire. Enveloppé d’une structure légère et translucide laissant transparaître l’ancienne structure, le bâtiment se tourne vers la ville. Son couronnement invite Fribourg à suivre TRNSTN Radio pour découvrir les activités proposées. Son soubassement s’ouvre largement afin d’aspirer les habitants. Tel un cheval de Troie, le projet ambitionne de convertir le site à une idéologie sociale, culturelle et inclusive, ignorant la course aux nouvelles technologies que BlueFactory promeut sans cesse.

Au terme de l'oubli est né de la prise de position, à la fois comme architecte et comme citoyen, de refuser le trajet de la matière lors de grands travaux territoriaux. Ces processus d’effacements spatiaux ont comme conséquence d'accentuer les rapports de domination immanents de nos sociétés occidentales et participent inéluctablement à une perte de lieux de mémoire. Le voyage physique et métaphorique de cette masse délaissée se clôt par sa disparition et la perte de son identité. Les thématiques soulevées par une attitude non-extractiviste et par un intérêt pour les communs interrogent la façon dont l’État doit se définir et endosser son rôle. Les crises actuelles ont agi comme des rappels, elles tendent à l’établir comme médiateur et catalyseur du débat contemporain. La recherche interroge l’honnêteté de l’État, au prisme des grands projets d’infrastructures, et la place à donner aux architectes. Une séquence de trois tunnels de contournement de La Chaux-de-Fonds et du Locle a été votée par la population. Le projet propose d'y répondre par une intervention miroir qui prévoit de stocker la matière extraite lors de leur percement. La perte démographique de cette région rend nécessaire cette rhétorique entre masse et vide, où des emplacements de grandes dimensions permettent d’accueillir des espaces pour les communs. Ces nouvelles formes fortes utilisent un répertoire de thématiques conjointes et transcendent les spécificités de leurs situations. La chorégraphie se matérialise par une jetée, un forum et un allmend, où l'oubli fait place à la vie et à ses habitant.e.s. « Peu aÌ peu [...] le vide est devenu pour moi ce que je connais aujourd’hui de plus peuplé. » (Romain Gary, La promesse de l’aube, 1960)

Au fil du temps, place du Scex à Sion a connu un flottement d’usages entre parc, industrie, stockage et artisanat. Ce lieu marqué par le mouvement et l’hésitation, les compromis et les regrets, jonché des traces de notre histoire passée et présente, est récemment passé en zone d’intérêt général, avec comme projet d’être laissé en attente, jusqu’à ce que ses bâtiments vétustes soient démolis au cours des trente prochaines années. L’hésitation se voit résolue par l’indécision et le silence. Ce lieu, dont nous connaissons le passé et l’avenir continuera de subir des changements, naturels et humains ; ses composants sont condamnés à devenir des résidus. L’intervention se centre sur l’orchestration de cet abandon, en observant les vestiges du passé et ceux à venir sans y porter de jugement de valeur. Le retrait progressif de ses programmes laissera des traces sur cette parcelle goudronnée et excavée. Avec les changements climatiques et les dangers grandissants des crues de la Sionne, certains souterrains se rempliront d’eau, créant une atmosphère fraîche pendant les périodes de fonte intense de la glace. Dans cette phase intermédiaire, l’espace public deviendra un lieu de relaxation et de réflexion sur le passage du temps, un témoin des changements de mœurs et de climats, un monument à l’attente. Puisqu’elle a toujours été la jumelle maudite de la place de la Planta, symbole de stabilité référentielle de la ville et de ses institutions, elle en devient le contrepoint, l’anti-place.