Cet article envisage le rapport entre architectures et lieux de pouvoir tel que ce dernier s’est redéfini à Marseille, à l’aune de la décentralisation, entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 1990. Cette décennie a en effet vu la construction d’un nouvel hôtel de région réalisé en deux tranches (1984-1986, arch. : Jean-Michel Battesti ; 1987-1991, arch. : Claude Parent, Christian Biaggi, Bruno Maurin) et d’un hôtel de département (1990-1994, arch. : William Alsop, John Lyall). Ces deux bâtiments, qui mobilisent des partis architecturaux très différents, viennent incarner l’affirmation du pouvoir de collectivités locales directement issues des lois de décentralisation de 1982 (conseil régional et conseil départemental en l’occurrence), cela dans un paysage que ces édifices contribuent largement à renouveler (requalification du quartier de la Butte-aux-Carmes pour le premier et de Saint-Just pour le second). Ils ont en outre en commun d’avoir été programmés et conçus à la faveur de la loi sur la maîtrise d’ouvrage publique (loi MOP, 1985) qui, par la généralisation des concours, entendait favoriser l’accès de nouveaux maîtres d’œuvre à la commande publique, l’inventivité architecturale et, in fine, la qualité des constructions. Ce contexte particulier invite à s’interroger sur la place qu’occupent ces édifices dans la ville. Il conduit surtout à poser la question de la dimension symbolique de leur architecture, à un moment où le concept d’« équipement public », qui avait prévalu au cours des Trente Glorieuses, tend à s’effacer au profit de celui d’« architecture publique », glissement sémantique révélateur de la manière dont les maîtres d’ouvrage se saisissent de l’architecture pour affirmer leur emprise et définir leur image. This article considers the relationships between architecture and places of power as they were redefined in Marseille, as a result of decentralisation policies between the mid-1980s and the mid-1990s. This decade saw the construction of a new ‘hôtel de région’ built in two campaigns (1984-1986, architects Jean-Michel Battesti, 1987-1991, architect Claude Parent, Christian Biaggi, Bruno Maurin) and a departmental hotel (1990-1994, architect William Alsop, John Lyall). These two buildings, of very different architectural design, embody the reinforcement of the power of local authorities resulting from the decentralisation laws of 1982 (regional council and departmental council in this case). The environments of these new buildings were largely modified by these buildings: requalification of the district of Butte-aux-Carmes for the first and of Saint-Just for the second. They also share the characteristic of having been programmed and designed under the Public Ownership Act (Loi MOP, 1985) which, through the generalisation of public competitions, was intended to promote the access to public works for new architects, the architectural inventiveness and, ultimately, the quality of buildings. This particular context invites us to question the place of these buildings in the city. It leads in particular to the question of the symbolic dimension of their architecture, while the concept of ‘public equipment’, which had prevailed during the Thirty glorious years, tends to disappear in favour of ‘public architecture’, a semantic shift which reveals how the local authorities used architecture to assert their influence and to define their image.