Maccaglia, Fabrizio, Construction Sociale et politique des espaces, des normes et des Trajectoires (CoST), Cités, Territoires, Environnement et Sociétés (CITERES), Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Tours (UT)-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Tours (UT), Claire Levy-Vroelant, Douglas Robertson, Jim Smyth, Maccaglia, Fabrizio, and Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Tours-Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)-Université de Tours
International audience; Une partie du parc de logement social palermitain est occupée de manière illégale . Au fil des décennies, des milliers de familles, pour la plupart appartenant aux franges les plus modestes de la société, se sont appropriées sans aucune autorisation un logement dans l’un des lotissements construits par la municipalité et l’Istituto Autonomo per le Case Popolari (IACP) . Cette pratique perdure encore aujourd’hui au point que la Préfecture de Palerme, dans une note datée de juin 2002, s’inquiète des proportions prises par le phénomène dans la capitale régionale et de ses « préoccupantes répercussions sur l’ordre public » (La Sicilia, 13/06/2002). La première partie de ce texte s’attache à mesurer l’ampleur de ce phénomène à Palerme et d’une manière plus générale à l’échelle de la Sicile. La seconde partie est construite autour de deux interrogations. D’une part, comment se déroule l’occupation illégale d’un lotissement ? D’autre part, de quelle manière les problèmes nés de cette situation d’occupation sont-ils pris en charge par les habitants ? La troisième partie s’intéresse aux ressorts de ce phénomène. Pourquoi une partie de la population a-t-elle recours à l’illégalité pour satisfaire son besoin en matière de logement ? Comment expliquer la persistance de ce phénomène depuis un demi siècle ? Un éclairage particulier sera porté sur le rôle des pouvoirs publics qui ont contribué, de manière directe et indirecte, consciente et inconsciente, à l’émergence et au progressif enracinement de cette pratique. En filigrane de ces interrogations, il y a la volonté de réfléchir sur l’impact des comportements illégaux dans un État de droit (Maccaglia, 2005). Constituent-ils une simple remise en cause du principe de légalité, toute norme comportant son lot de transgressions, ou, au contraire, sont-ils de nature à porter atteinte à l’édifice social en altérant les règles qui régissent la vie collective ? Comment aménager un territoire dont on ne maîtrise pas les usages ? Comment construire une action publique lorsqu’il n’y a pas de consensus sur les principes censés régir la vie commune ? C’est principalement au travers de l’étude du quartier ZEN 2 qu’il sera répondu à ces interrogations car il constitue à la fois un cas emblématique et exemplaire. Dessiné par le célèbre architecte Vittorio Gregotti, il a été mis en chantier à la charnière des années 1970 et 1980 pour réorienter l’urbanisation vers le nord : ZEN 2 est en effet l’anagramme de Zone d’Expansion Nord n°2 (Despuches, 1998 et 2005). Ce quartier a été le théâtre de la dernière occupation de masse que Palerme ait connue. Il incarne aujourd’hui pour nombre d’habitants tout à la fois la faillite de la politique municipale en matière de logement social et le mal governo dont la ville a été l’un des laboratoires méridionaux.