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La traduction littéraire offre à ses disciples un éventail de techniques et pratiques langagières inventives qui, aux yeux de l’observateur néophyte, pourraient prêter à l’activité des traits presque ludiques. La réalité est à l’évidence plus nuancée tant la tâche est semée de contraintes et de frustrations, tel un prolongement insidieux de la peine endurée par l’auteur du texte original, l’écrivain. Une persévérance à l’unisson Si Balzac louait, dans sa correspondance, la disposition de son...

André Suarès s’intéresse dès 1895 à Gabriele D’Annunzio et à son œuvre. Il devine en lui un frère en littérature, en quête, comme lui, de grandeur et de beauté. Les deux hommes se rencontrent en 1910, à l’occasion du séjour français de l’écrivain italien. Les échanges épistolaires témoignent dès lors d’une admiration réciproque. Avec la Première Guerre mondiale, Suarès découvre en D’Annunzio un homme d’action qui le fascine : en lui s’épanouit l’idéal du poète condottière.

Dans l’immense somme de notes que forment les carnets de Suarès, un certain nombre de pages font écho aux différentes orientations dessinées par les communications réunies dans ce volume : réflexions sur la Méditerranée et sur ses langues, notes sur l’Italie, l’Espagne et la Provence, remarques sur certains contemporains majeurs (Unamuno, D’Annunzio et Gustave Fayet). Autant d’extraits inédits révélateurs d’un rapport souvent inattendu de Suarès à la Méditerranée.

Deux raisons essentielles expliquent que Zola soit devenu un véritable homme d’affaires et qu’il ait entretenu avec l’argent un rapport moderne, tout à fait nouveau, à son époque, pour un homme de lettres : ses fonctions de chef de la publicité à la librairie Hachette et l’impérieuse nécessité de gagner sa vie pour subvenir à ses besoins, à ceux de sa mère, veuve dès 1847 et sans ressources, et à ceux de Gabrielle-Alexandrine, sa compagne depuis 1865, son épouse depuis le 31 mai 1870. Durant ...

Dresser un portrait de l’écrivain en publicitaire revient, dans une large mesure, à s’intéresser aux marges de l’histoire littéraire. Celles-ci, on le sait, sont souvent peuplées d’illustres inconnus, aussi célèbres en leur temps que rapidement écartés des classements et des hiérarchies des historiens de la littérature. Paul Reboux (pseudonyme de Paul-Henri Amilet, 1877-1963) est l’un d’entre eux : l’importance de l’oubli dans lequel il est tombé est proportionnelle à l’intense activité qu’il...

Le dramaturge, le comédien, le cinéaste, le revuiste, le romancier, le poète, l’essayiste, le peintre et le caricaturiste, le journaliste, l’homme de radio et de télévision, l’humoriste et le moraliste, mais encore le tricheur, le joueur ou l’illusionniste – ainsi qu’il s’est plu à se figurer : de tous ces Sacha Guitry, et sans doute en aura-t-on oublié quelque autre, le publicitaire est certainement l’un des moins connus. Encore qu’une telle accumulation de talents, doublée d’un tel souci d’...

Comme bien d’autres écrivains de sa génération, George Sand a professé un certain mépris à l’égard de la littérature commerciale, du négoce éditorial et du petit personnel de la boutique des lettres. Elle n’est pas de la race des puffistes ni des « réclamiers », plutôt de celle des « vieux troubadours » qui résistent tant bien que mal à la marchandisation de la littérature. Point chez elle de goût pour les « gasconnades » d’usage en matière de camaraderie littéraire ; point non plus de symptô...

Dans le champ littéraire français de l’entre-deux-guerres, marqué par l’apparition d’une nouvelle génération d’écrivains, dont beaucoup ne disposaient plus de la légitimité symbolique que donnait l’éducation bourgeoise et se définissaient davantage comme des professionnels naviguant entre le monde du journalisme, de l’édition et du spectacle, le rôle du publicitaire cessa d’être considéré comme annexe et bassement mercantile. Il offrit à nombre d’écrivains, outre quelques revenus complémentai...

« Je réclame le premier rang parmi ceux qui tâchent de déniaiser l’art, de le faire coucher avec la vie. Un écrivain a tous les droits (s’il sait écrire), tous et quelques autres encore. Et au premier chef le droit de vanter le papier à lettre Elite ou le vin Nicolas, le droit de rire des sots ou de se les rouler au soleil. Et vive la liberté ! » Joseph Delteil, « Les grandes enquêtes de “Paris-Soir”, Industrie, Commerce et Littérature », Paris-Soir, 23 février 1927 Innombrables sont les écri...

En mariant le nom de Mucha au papier à cigarette Job, celui de Cassandre au « Dubo/Dubon/Dubonnet » ou de Savignac à la vache Monsavon, l’affiche a imprimé dans l’imaginaire collectif la mémoire de la publicité artistique. Mais qui se souvient que Victor Hugo associa sa signature à l’Encre Triple noire (pourtant réputée indélébile), que Raoul Ponchon, dans Le Courrier français, abonna sa plume aux Pastilles Géraudel, que Cocteau posa dans Paris-Match pour les téléviseurs Ribet-Desjardins ? De grands noms des belles-lettres comme Valéry, Cendrars, Giono ou Queneau, ont signé des textes publicitaires – de très beaux textes. Un tenace destin d’oubli, symptomatique du scandale que constitue le mélange de la littérature pure, gratuite, avec la « littérature » intéressée et appliquée, pèse sur les innombrables contributions des écrivains à la publicité depuis le xixe siècle. Ce volume s’emploie à redessiner l’un des visages les plus méconnus de l’écrivain et à éclairer une zone d’ombre de la « condition littéraire ». On y découvrira une galerie de portraits insolites, un album de famille inédit, où se trouvent réunis des auteurs apparemment aussi peu apparentés que Zola et les Gautier, Sacha Guitry et Léon-Paul Fargue, Paul Reboux et Robert Desnos. On y trouvera des informations sur les motivations diverses qui ont suscité et suscitent encore aujourd’hui de telles collaborations avec les marques, la manière dont a été vécu et « géré » le grand écart entre les exigences de l’œuvre et celles de la promotion marchande, le rôle joué par la publicité dans l’économie de la carrière littéraire.

« on met en vente […] le divin et plus que divin roman du très célèbre Théophile Gautier, Mademoiselle de Maupin […]. – Certes, cela vaudrait bien une annonce de trois lignes dans Les Débats et Le Courrier français, entre les pessaires élastiques, les cols en crinoline, les biberons en tétine incorruptible, la pâte de Regnault et les recettes contre les fleurs blanches. » Théophile Gautier, Mademoiselle de Maupin, « Préface », mai 1834. « À peine ai-je goûté deux doigts du vin magique Que, de...

Dès le milieu des années 1920, Pierre Mac Orlan se fait le chantre de la publicité. Dans un texte de 1934 paru dans Le Miroir du Monde, il affirme ainsi qu’« il est permis, depuis la guerre, de considérer la publicité comme un des beaux arts » (VP, 19). Auteur de nombreux textes publicitaires, il multiplie les supports : le journal, la radio, la brochure promotionnelle ou, avec Le Printemps, le livre, sont autant de moyens susceptibles de vanter à la fois les mérites des produits et ceux de l...

Joël Dicker « écrit d’or », pourrait-on dire, en se souvenant du slogan « Cuisinez d’or avec Astra » dont Roland Barthes a jadis extrait des analyses définitives. La Vérité sur l’affaire Harry Quebert est publié à la rentrée littéraire 2012 et ce « roman américain », dont l’action se situe sur la côte Est des États-Unis, devient rapidement un best-seller. Son succès est peut-être emblématique de la « fausse littérature » au regard de la « vraie », de la « fake literature » est-on même tenté d...

Certains auteurs contemporains ont développé au cours des dernières décennies une gamme de postures auctoriales caractérisées par le recours systématique à l’ironie. Les codes littéraires cristallisés, la figure mythique du Grand Écrivain et l’ego de l’auteur lui-même deviennent les cibles privilégiées de leurs attaques subtiles : d’une telle attitude dérive un ethos d'auteur évanescent, jovial et, de nos jours, farouchement isolé, enclin à adopter une pose de dandy contemporain. L’objectif de cet article est d’interroger un thème qui revient avec une fréquence significative dans ce corpus, l’image d’un écrivain qui s’enferme dans sa propre maison. Notre conviction est que la reprise de ce topos romantique permet aux auteurs abordés ici d'approfondir leur paratopie particulière, en justifiant à la fois leur position problématique dans la société en tant qu’écrivains et un ensemble d’œuvres littéraires caractérisées par un goût obstiné pour le second degré, la métalèpse et l’expérimentation formelle. En particulier, nous examinerons un curieux texte qui illustre magistralement cette tendance des écrivains ironiques à se dépeindre comme des individus cloîtrés : il s’agit d’un autoportrait oblique en forme de description méticuleuse d’un appartement de 50m2, Intérieur de Thomas Clerc (2013). Si, dans une époque littéraire défavorable à l’ironie, une telle propension à un détachement ludique et relativement insouciant peut susciter des méfiances et des perplexités, l’histoire nous enseigne que la posture du dandy désenchanté, de l’anachorète, bref, de l’écrivain qui rejeté la doxa de son temps, peut constituer une façon particulière de légitimer sa place dans le champ littéraire. In recent decades, some contemporary authors have developed a range of auctorial postures characterised by the systematic use of irony. Crystallised literary codes, the mythical figure of the Great Writer and the author's own ego become the favourite targets of their subtle attacks: from such an attitude derives the ethos of an evanescent, jovial and, nowadays, fiercely isolated author, inclined to adopt a contemporary dandy pose. The aim of this article is to examine a theme that recurs with significant frequency in this corpus, the image of a writer who locks himself in his own house. It is our belief that the reworking of this romantic topos allows the authors discussed here to deepen their particular paratopy, justifying both their problematic position in society as writers and a body of literary work characterised by a stubborn taste for second degree, metalepsis and formal experimentation. In particular, we will discuss a curious text that brilliantly illustrates this tendency of ironic writers to portray themselves as cloistered individuals: an oblique self-portrait in the form of a meticulous description of a 50m2 flat, Thomas Clerc's Intérieur (2013). If, in a literary age hostile to irony, such a propensity for playful and relatively unconcerned detachment may arouse suspicions and perplexities, history teaches us that the posture of the disenchanted dandy, the anchorite, or, in other words, the writer who rejects the doxa of his time, can be a particular way of legitimizing his place in the literary field.

Alexandre Dumas n’est pas un artiste de la publicité, comme ceux de ses confrères qui excellent dans les vers publicitaires ou qui brillent dans l’invention du slogan destiné à faire mouche. Mais sa posture d’écrivain vulgarisateur, qui confond volontiers sa plume, ses entreprises et sa vie privée, en fait l’archétype de l’écrivain-publiciste à l’ère de la littérature industrielle. « Le journaliste-banquiste – écrit Jean-Didier Wagneur – cherche tous les moyens pour attirer le chaland : ce n’...

Redécouvert depuis deux siècles, Rutebeuf a désormais le statut d’un grand poète du Moyen Âge. Cette réputation a toutefois eu pour effet secondaire de décourager l’effort de relire son œuvre sur nouveaux frais. Sa polygraphie, allant et venant entre fabliau et hagiographie, satire du monde et auto-dérision, a aussi incité tantôt à répartir sa cinquantaine de poèmes en différentes catégories ayant peu à voir entre elles, tantôt à privilégier tel ou tel groupe de textes au détriment du reste. Examinant les acquis scientifiques existants, tant dans le domaine littéraire et philologique que sur le plan historiographique, et affrontant de nouvelles questions provoquées par une poésie plus subtile qu’on ne l’a souvent crue, cette étude ambitionne de restituer à l’écrivain médiéval une écriture consciente de ses forces et de ses faiblesses, écriture élaborée en prise et aux prises avec l’histoire et l’actualité, réfléchissant sur les rapports entre son langage inéluctablement fabuleux et la réalité du monde qu’il habite, non sans en tirer quelques prétentions audacieuses à propos des mérites propres à son travail. L’unité de l’œuvre de Rutebeuf provient de la constance de l’interrogation qui la traverse. Par là, cet individu dont on ignore même le vrai nom apparaît comme un sujet, identique à lui-même dans la diversité de ses actes qu’il s’attribue tous, et dont il assume la pleine responsabilité. Rediscovered for two centuries, Rutebeuf now has the status of a great poet of the Middle Ages. This reputation, however, had the side effect of discouraging the effort to revisit his work on a fresh basis. Also his polygraphy, going back and forth between fabliau and hagiography, satire of the world and self-mockery, impelled critics sometimes to distribute his fifty or so poems into different categories that have little to do with each other, sometimes to favour this or that group of texts to the detriment of the others. Examining the existing scientific achievements, as in the literary and philological field as in terms of historiography, and confronting new questions stimulated by poetry more subtle than has often been believed, this study has ambition to restitute to the medieval writer a writing conscious of its powers and its weaknesses, writing elaborated in contact and dealing with history and current affairs, reflecting on the relationship between his ineluctably fabulous language and the reality of the world he lives, not without drawing some audacious claims about the merits specific to his labour. The unity of Rutebeuf’s work results of the constancy of the interrogation running through it. In that way, this person even whose real name remains unknown appears as a subject, identical to himself in the diversity of his acts, acts that he attributes to his own credit and of which he takes the whole responsibility. Riscoperto negli ultimi due secoli, Rutebeuf ha oggi lo status di grande poeta medievale. Questa fama, tuttavia, ha avuto l'effetto collaterale di scoraggiare lo sforzo di rileggere la sua opera con occhi nuovi. La sua poligrafia, che spazia dal fabliau all'agiografia, dalla satira del mondo all'autoironia, ha portato anche a suddividere le sue circa cinquanta poesie in categorie diverse che hanno poco a che fare l'una con l'altra, e a privilegiare l'uno o l'altro gruppo di testi rispetto agli altri. Esaminando le conoscenze scientifiche esistenti, sia in campo letterario e filologico che storiografico, e affrontando nuovi interrogativi sollevati da una poesia più sottile di quanto spesso si sia pensato, questo studio si propone di restituire allo scrittore medievale una forma di scrittura consapevole dei suoi punti di forza e di debolezza, riflette sul rapporto tra il suo linguaggio ineluttabilmente favoloso e la realtà del mondo che abita, non senza fare alcune audaci affermazioni sui meriti del suo lavoro. L'unità dell'opera di Rutebeuf deriva dalla costanza dell'interrogativo che la attraversa : questo individuo, di cui non si conosce nemmeno il vero nome, appare come un soggetto, identico a se stesso nella diversità dei suoi atti, che attribuisce tutti a se stesso e di cui si assume la piena responsabilità.

La quête d’une définition de l’idéologie de la révolte chez Vallès soulève une triple difficulté : difficulté théorique par l’usage qu’on fait du concept d’idéologie au sujet d’une révolte aussi évidemment passionnelle ; difficulté de chercher l’idéologie dans un roman ou une suite d’écrits dès lors qu’on envisage le contenu de ces livres et pas seulement la façon dont ils s’insèrent dans une pratique sociale, celle de l’écrivain Second Empire ou celle de l’exilé condamné ; difficulté histori...

J.-R. Derré. – J’ai constaté l’heureuse complémentarité des exposés de Ph. Lejeune et R. Bellet. M. Nathan. – Comment se relient la biographie combattante (M. Bellet) et la technique narrative (Ph. Lejeune) ? Ph. Lejeune pense-t-il que la technique narrative qu’il a montrée est due, chez Vallès, à l’agressivité de Vallès, ou à une sorte de dérobade ? ou simplement, à une volonté de dérision ? Ph. Lejeune. – J’ai décrit un comment (des techniques), non un sens. Commencer par un comment est une...

Raconter son enfance semble avoir été l’un des plus anciens et des plus constants projets de Vallès. Dès 1857, dans ses premières chroniques journalistiques, il mêle aux échos de la vie parisienne des souvenirs d’enfance tour à tour nostalgiques et vengeurs. De 1857 à 1876, dans ses articles puis dans des textes romanesques, il a plusieurs fois réécrit sinon le même récit d’enfance, du moins des versions successives du récit d’une même enfance. Les principales variations sur ce thème sont : l...

L’aperçu précédent de l’oscillation de la « fonction-auteur » sur le plan du contenu nous a montré le mouvement par lequel cette « instance paradoxale » se constitue soit en « groupe assujetti », soit en « groupe-sujet », le premier, malgré toute volonté de libération, étant étroitement lié à l’écrasement intolérable de l’individu par les diverses institutions de l’appareil d’Etat ; le second, toujours menacé d’assujettissement, étant capable néanmoins d’effectuer, en tant que machine de guer...

Le thème de l’amour dans l’Enfant se fait remarquer par sa présence insistante. A lire la dédicace du livre, le lecteur peut penser que le premier volume de la trilogie de Jacques Vingtras, en retraçant le drame de l’enfant « qu’on fit pleurer dans la famille » et qui fut rossé par ses parents, est un roman de la soif d’amour, de cet amour maternel et paternel si nécessaire au bonheur de l’enfance. Or dans l’Enfant, l’aspiration à l’amour ne se réduit pas à ce seul besoin d’être choyé. Dès so...

On peut distinguer trois moments spécifiques dans l’élaboration du récit d’enfance qui aboutit à L’Enfant. Ils marquent chaque fois une continuité et une rupture ; ils fournissent, chacun avec un mode propre d’évocation, une image de la même enfance. Ils sont largement et presque également dissociés dans le temps : 1861, 1869 et 1878. Chaque image a sa valeur totale en soi, et se veut assez totale pour qu’on la retienne à part, en ne la confondant pas avec les innombrables lambeaux (« guenill...

Les aperçus des chapitres précédents nous permettent d’aborder l’examen des « micro-fêlures » de la strate de la segmentation souple, où surgit précisément la problématique du discours autobiographique abordée au premier chapitre. Car il faut tenir compte de la traversée des segments molaires par ce que Gilles Deleuze appelle une « instance paradoxale » qui « a pour fonction de parcourir les séries hétérogènes, et d’une part, de les coordonner, de les faire résonner et converger, d’autre part...

Quelques remarques préalables, d’abord : Mettre l’accent sur les aspects régressifs des choix existentiels (donc politiques) de Vallès n’est pas en l’occurrence tenter de subvertir ou de réduire son discours ou ses actes. Toute option idéologique se relie nécessairement au vécu d’une enfance. C’est cela seulement que nous avons voulu éclairer. Surtout, nous n’avons pas cherché à traquer Vallès, quand même nous tentons de mettre au jour ce que lui-même ne se fût point avoué. Nous n’avons auton...

Le point de départ de la mise en place du premier pôle segmentaire est la définition de deux sous-segments constitutifs de la strate molaire, articulés selon deux formes de solidarité, la solidarité familiale et la solidarité populaire. C’est à partir du repérage de ces deux formes de solidarité que nous pouvons considérer l’agencement de la segmentarité dans les trois romans. 1. La Solidarité Familiale L’Enfant Dans le premier roman de la Trilogie, la solidarité familiale se répartit en quat...

La Trilogie de Jacques Vingtras, entreprise pendant l'exil de Jules Vallès à Londres, sera son « œuvre de sentiment et de combat » où se lie l'engagement social acharné de l'insurgé à la conscience artistique croissante du romancier. Il s'agit ici de dégager les traits essentiels de cette rencontre heureuse en traçant le déploiement des oppositions thématiques vis-à-vis de l'agencement des figures principales, tant narratives que tropologiques, par lesquelles s'exprime ce cri de combat et de sentiment.

Dans le chapitre précédent, nous avons voulu non seulement détailler comment l’emploi vallésien des figures de rhétorique se conjugue avec l’énonciation de la « fonction-auteur » aux lieux de convergence dans le texte, mais aussi souligner des points ou termes « singuliers » qui ressortent incessamment dans la Trilogie à tout niveau de la stratification molaire et moléculaire. Les oscillations que nous avons mises en valeur entre la divergence/disjonction et la convergence/conjonction des div...

J.-R. Derré. – La discussion est ouverte sur la façon dont l’œuvre L’Enfant a été reçue par les étudiants de l’année à l’Université, lorsqu’elle a été inscrite au « programme » comme à Lyon ; ou lorsqu’on l’a étudiée dans certaines Khâgnes. Quelles impressions et leçons avez-vous retirées comme enseignants ? M. Junot. – Mon expérience en hypokhâgne, limitée à quatre heures, est trop étroite. P. Michel. – La lecture spontanée de L’Enfant m’a paru souvent être une lecture sentimentale : on voit...

Face aux énonciations individuelles et collectives de solidarité qui traversent la Trilogie, il existe un autre segment, celui de l’intolérable, « l’arrachement à tout ce qui (...) permet [à Jacques Vingtras] de saisir son identité », c’est-à-dire le rassemblement de forces sociales oppressives qui sont implicitement vouées à l’anéantissement de tout sentiment chez l’individu et de toute impulsion de solidarité entre les individus. Ce deuxième segment se divise entre deux ou trois sous-segmen...

Il peut sembler à première vue paradoxal d’entreprendre l’examen de l’image de la femme dans la Trilogie de Jules Vallès dont on a dit qu’il « était incapable de faire parler la femme dans ses livres » et dont l’œuvre a été jugée « la plus chaste qui soit ». Bien que l’auteur de Jacques Vingt ras n’accorde en effet qu’une place secondaire à la femme, elle n’est cependant pas absente ; le texte de la Trilogie propose d’elle, de sa situation relativement à l’homme, et de son rôle dans la sociét...

The French Riviera or Côte d’Azur stretches from Marseille to the Italian border and has traditionally attracted a good many British and American writers, most of whom concentrated in and around Nice, Cannes, Menton, Antibes, Vence, namely the eastern end of the coast. Nevertheless, Toulon and the Var area should not be overlooked as they hosted many a brilliant author, in particular such neighbouring seaside resorts as Hyères and Le Lavandou to the East of Toulon, Sanary and Bandol to the west. Inevitably, Toulon, being a larger town and a naval base, was, and still is, a convenient stopping place for travellers driving along the coast, and an essential one for people outside Toulon who had to do some shopping, go to the doctor’s, remember Aldous Huxley, visit the brothels (Evelyn Waugh was a regular) or opium dens like Cocteau and so many others. Joseph Conrad, Edith Wharton, Paul Bourget, Katherine Mansfield, D.H. Lawrence, Huxley, among many others, Ford Madox last but not least, have stayed in the Toulon area where they found inspiration, beauty and warmth. This can be felt throughout their works, in their personal achievements, and I am convinced that their confrontation with the local atmosphere and landscapes has contributed to their art and literary production. La Côte d’Azur s’étend de Marseille à la frontière italienne et a traditionnellement attiré bon nombre d’écrivains britanniques et américains, qui se sont surtout concentrés à et autour de Nice, Cannes, Menton, Antibes, Vence, c’est-à-dire vers l’est de la côte. Cependant, on ne devrait pas négliger Toulon et le Var qui ont accueilli plus d’un auteur brillant, plus particulièrement les stations balnéaires voisines comme Hyères et Le Lavandou à l’est de Toulon, et Sanary et Bandol à l’ouest. Immanquablement, Toulon, étant une plus grande ville et une base navale, était, et est encore, une étape pour les voyageurs qui longeaient la côte, et un passage obligé pour les gens du voisinage qui devaient faire des courses, aller chez le médecin, comme c’était le cas pour Aldous Huxley, fréquenter les maisons closes comme Evelyn Waugh ou une fumerie d’opium comme Cocteau ou bien d’autres. Joseph Conrad, Edith Wharton, Paul Bourget à l’est, Katherine Mansfield , D.H. Lawrence, Huxley à l’ouest, et tant d’autres, Ford Madox Ford non des moindres, ont fréquenté la région de Toulon où ils ont trouvé inspiration, beauté et chaleur. On ressent cela dans leurs œuvres, dans leurs accomplissements personnels, et je suis convaincu que leur confrontation avec l’atmosphère locale et les paysages a contribué à leur art et à leur production littéraire.