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Durant son règne, le couronnement apparaît comme le moment le plus important de la vie d’un souverain : par cette intronisation il devient le guide de son peuple et l’incarnation du pouvoir spirituel et temporel. Dans les manuscrits médiévaux le traitement iconographique de ce moment permet de mettre en exergue un roi et son action politique. Toutefois le choix ou non de représenter cette scène est un indicateur fort du sens de lecture que l’on veut donner au texte. Les chroniques historiques...

Longtemps considérée en Europe comme la forme naturelle de gouvernement, la royauté a su évoluer dans la durée, comme le montrent les études réunies dans ce livre. Le roi n’exerçait un pouvoir légitime qu’après des rites de passage. Le sacre tirait sa force de ses racines bibliques (soulignant l’élection divine) et d’une conception eschatologique appelant le roi à conduire son peuple vers un royaume qui n’est pas de ce monde. Il a été longtemps une cérémonie mystique, dans le chœur clos d’une cathédrale, avant d’être « médiatisé » et de se prêter à la mise en scène fastueuse et festive. Si l’élection du roi n’a jamais totalement disparu, la succession héréditaire s’est imposée, et la reine a été associée très tôt aux rites de l’onction et du couronnement. L’idée selon laquelle le roi tenait de ses sujets l’autorité qu’il avait sur eux, et non plus de Dieu, a été le grand retournement de la Révolution. Les monarchies constitutionnelles du xixe siècle ont ainsi adopté des rites de substitution : serment devant les chambres représentatives, discours du trône. L’ouvrage fait ainsi l’histoire d’une monarchie sans cesse réinventée.

Pendant longtemps le sacre est resté une cérémonie mystérieuse, qui n’avait pour témoins que quelques privilégiés dans le chœur clos d’une cathédrale et ne pouvait être comprise que par des lettrés. Il n’existe presque pas de description précise dans un texte narratif médiéval, seules les sources liturgiques en gardent la mémoire. En dehors des clercs, il n’y avait guère que le roi, le principal intéressé, qui devait être initié, avec peut-être quelques acteurs principaux. L’invention de l’im...

L’an 1713 marque un tournant dans l’histoire de la Maison de Savoie et de ses États. Cette année-là, après le traité d’Utrecht, le duché fut en effet élevé à la dignité royale. Victor Amédée II, qui, pendant la guerre de succession espagnole, avait renversé les alliances, en passant du front des Bourbons au front des Habsbourg, vit ses ambitions récompensées par la couronne du royaume de Sicile, cédée par Philippe V. Nous ne nous étendrons pas davantage sur les étapes de l’histoire des aspira...

Les femmes ont toute leur place dans une réflexion sur les sacres et couronnements. Si l’épouse de Pépin le Bref, Berthe, n’a bénéficié, en 754 à Saint-Denis, que d’une bénédiction spécifique, celle de Louis le Pieux, Hermengarde, a reçu en 816 un diadème apporté à Reims par le pape Étienne IV. Dès la génération suivante l’onction a été conférée à Judith puis Ermentrude, respectivement fille et épouse de Charles le Chauve, comme Patrick Demouy l’a rappelé dans le chapitre précédent en examina...

L’abbé Suger de Saint-Denis raconte un incident survenu le 3 août 1108 au sacre de Louis VI à Orléans. Une délégation de clercs de l’Église de Reims était arrivée à la fin de la cérémonie pour exiger son interruption immédiate et dénoncer l’illégitimité du couronnement du roi en brandissant des lettres pontificales. Selon l’autorité apostolique seul l’archevêque de Reims, avait les prémices du premier couronnement royal, une prérogative détenue par son Église depuis le baptême de Clovis par R...

Le passé est un espace infini de la connaissance ; la recherche historique s’efforce d’en éclairer des traits, elle réussit parfois à en élucider certains, parce qu’ils sont d’approche plus facile, bien pourvus de sources. Les cérémonies des sacres des souverains avaient pu relever de cette frange mieux connue, dans la mesure où elles présentaient des faits établis, offraient des certitudes institutionnelles reposant sur des textes normatifs et sur des récits de témoins. Cette belle et trompe...

Témoin du dernier siècle de l’Ancien Régime, Voltaire a été le contemporain de deux sacres. Celui de Louis XV, en 1722, ne semble guère avoir retenu son attention, accaparée alors par sa carrière littéraire. Lors de celui de Louis XVI, en 1773, le châtelain octogénaire de Ferney est loin de Paris et de Reims, mais ses amis l’ont informé, et l’événement suscite ses commentaires ironiques dans une lettre adressée au roi de Prusse, Frédéric II, son vieux correspondant : « C’est un spectacle bien...

Rituel essentiel de la monarchie française, le sacre est un spectacle qui, par sa mise en scène particulière, affirme symboliquement tant la continuité de l’institution que la légitimité du nouveau roi. Ce théâtre du pouvoir se joue dans un décor, avec des accessoires et des acteurs, précisément détaillés dans l’Ordo. Les pairs de France y sont des acteurs majeurs. Cependant, contrairement aux pairs ecclésiastiques, à partir du xve siècle, les pairs laïcs « réels » ont disparu et sont remplac...

Les ouvrages sur les sacres et les couronnements, de même que les communications de ce présent colloque, ont jusqu’à présent surtout porté sur les rois et les empereurs, en laissant souvent de côté les princes territoriaux. Nous tenterons d’analyser les modalités d’intronisation de ces derniers à partir d’un exemple qui s’imposait lors de ce colloque nancéien, celui des ducs de Lorraine, dont il est plus souvent question des pompes funèbres, dont les plus connues furent celles de Charles III ...

Le 29 mai 1825, Charles X fut sacré à Reims au cours d’une cérémonie grandiose et soigneusement orchestrée, bien connue grâce aux travaux de Landric Raillat. En écho à la cérémonie rémoise, des fêtes publiques furent organisées le même jour ou dans les jours suivants partout dans le pays. Si les Français purent lire, dans la presse, des comptes rendus circonstanciés du sacre lui-même, ces manifestations locales furent pour beaucoup le seul véritable contact qu’ils eurent avec l’événement. Ces...

L’oraison d’intronisation Sta et retine apparaît en Francie occidentale vers 900-950 dans l’ordo dit des « onze formules ». Voici l’extrait sur lequel nous souhaitons attirer l’attention : À un ou deux mots près, cette formule d’intronisation se perpétue en France jusqu’au dernier sacre de 1825. Dans les deux ordines carolingiens du xe siècle, l’ordo des onze formules (900-950) et l’ordo de Ratold (980 ca.), l’oraison est titrée : « Regii status designatio », c’est-à-dire « Désignation de l’...

La réforme de la cérémonie du sacre en Bohême et la rédaction d’un nouvel ordo sont associées au règne de l’empereur et roi de Bohême Charles IV de Luxembourg (1346-1378). La symbolique du rituel du sacre a considérablement changé et pris de l’importance après l’accession au trône de Jean l’Aveugle (1310), premier roi de la dynastie des Luxembourg en Bohême et père de Charles IV. Les changements politiques expliquent cette évolution : les prédécesseurs des Luxembourg appartenant à la dynastie...

Roi restauré à deux reprises en 1814 et 1815, un cas de figure inédit au sein de la troisième race ; roi admiré, respecté voire à l’occasion vénéré, par la grâce de son droit de naissance qui lui a conféré une aura de légitimité innée devenue une denrée rare au xixe siècle ; roi auto-proclamé depuis 1795, et n’ayant cessé de faire la preuve depuis, envers et contre tout, de la pleine et entière conscience de son rang, ce qui a relevé pendant presque deux décennies de l’exploit, d’aucuns dirai...

De l’invention de la tradition en 800 jusqu’à 1452, quand Frédéric III de Habsbourg reçoit la couronne impériale dans la basilique Saint-Pierre, vingt-sept empereurs sont couronnés à Rome. Les derniers couronnements impériaux ont souvent été présentés comme des rituels vidés de leur substance : « bedeutungslos », comme on peut le lire dans l’œuvre monumentale Geschichte der Stadt Rom im Mittelalter de Ferdinand Gregorovius. Selon l’historien allemand, Sigismond de Luxembourg « tournait le dos...

Cette étude est une première approche d’un sujet très peu étudié, le sacre et couronnement des reines d’Écosse. Au regard de la recherche britannique des cinquante dernières années, elle propose également une nouvelle interprétation du délai entre le mariage et le cérémoniel royal de Marie de Lorraine (1515-1560). Connue sur les îles britanniques sous le nom « Mary of Guise », la fille aînée du premier duc de Guise et seconde épouse de Jacques V d’Écosse (1512-1542) est la dernière reine cons...

Dans les chroniques ottomanes du xviie siècle, le sultan Mehmed IV est décrit comme le sultan victorieux, triomphant et glorieux, qui marche avec succès, de ville en ville, de conquête en conquête, sans que soient évoquées les difficultés de la guerre et des combats. Il répand, selon Evliyâ Çelebi, « une clameur à l’est et à l’ouest, un cri d’horreur et de lamentation dans les pays des infidèles et de tous les peuples », pour vaincre l’ennemi avec un zèle prophétique. Dans la même veine, Ahme...

Le Sacre de Napoléon et la naissance du Bonapartisme Le 2 décembre 1804 (11 frimaire an XIII), Napoléon Bonaparte est sacré empereur des français dans la cathédrale Notre-Dame de Paris par le pape Pie VII, au cours d’une cérémonie spectaculaire de près de cinq heures, mise en scène par le peintre Jacques-Louis David en 1808 dans le tableau célèbre Le Sacre de Napoléon, conservé au musée du Louvre. Rappelant le sacre de Charlemagne en l’an 800, la cérémonie, minutieusement préparée, a pour b...

Dès la fin du xve siècles, l’imprimerie commence à s’emparer de l’actualité : des nouvelles imprimées françaises, des avvisi italiens, des Zeitungen allemands, des News anglaises et des relaciones de sucesos espagnoles médiatisent des événements contemporains et bientôt les cérémonies du pouvoir dont les sacres et les couronnements. Le déroulement du rituel, les gestes et les paroles des princes européens sont ainsi saisis dans des occasionnels et livres de fête. Dans le cadre de l’intérêt cr...

L’ombre de Napoléon plane incontestablement sur l’Europe du xixe siècle et bien sûr particulièrement sur la France, où le sacre du 2 décembre 1804, immortalisé par David, a obsédé les politiques pendant cinq décennies. Pour beaucoup l’exécution de Louis XVI marque la fin de la royauté de droit divin. Ceux qui souhaitaient la restaurer pouvaient-ils remettre en scène le sacre ancestral ? Napoléon avait cassé les codes. La légitimité procédait désormais de la Nation. Napoléon changea de lieu et...

France et Angleterre ont connu un développement parallèle de la mise en forme du sacre royal, mais l’iconographie n’en garde pas les mêmes témoignages. Étudiant les chroniques des règnes de Guillaume le Conquérant à Henri III, Ismérie Triquet ne trouve pas d’images de l’onction et rarement du couronnement ; la juxtaposition de la mort du souverain et de la figure de son successeur en majesté fait du sacre d’abord un outil de légitimation dynastique. Alors qu’en France la sacralité d’origine s...

« Quelques prosperitez que Dieu me donne, je ne puis être satisfait, que mon Sacre n’ait affermi mon Règne, et que mon zèle pour l’accomplissement de cette auguste et sainte cérémonie n’ait surmonté tous les obstacles qui m’en ont empêché jusqu’à présent. » Louis XIV mettait en lumière l’importance qu’il accordait au sacre, dont il attendait qu’il fût performatif. Il devait construire son pouvoir en renforçant son autorité, révélant une croyance dans les vertus sacramentelles du rituel et l’e...

À la lecture des actes de ce colloque, ambitieux par sa problématique, le champ géographique et l’amplitude chronologique, une question revient comme un leitmotiv : qu’est-ce qui fait le roi ? Elle transparaît déjà dans le titre et dans l’historiographie du sujet. Les Français parlent de sacres, quand les Allemands parlent de Krönungen et les Anglais de Coronations ; c’est bien le seul couronnement du roi que représentent les chroniques anglaises. Il s’agit pourtant de cérémonies similaires c...

Apparu en France avec l’avènement de la dynastie carolingienne, le rituel du sacre du roi et de la reine, pétri de références à l’Ancien Testament, doit beaucoup à la plume de l’archevêque de Reims Hincmar (845-882), comme le rappelle Patrick Demouy. Théologien et canoniste, le successeur de saint Remi aspirait à jouer auprès du successeur de Clovis le rôle d’un conseiller, voire d’un prophète, lui tendant le miroir où il pourrait voir l’image du roi idéal. Les oraisons appellent sur lui la g...

Prêter serment pour régner : les monarchies constitutionnelles allemandes La confédération germanique fut créée en 1815, lors du Congrès de Vienne, pour restructurer la plus grande partie de l’espace germanophone, à la suite des bouleversements de l’époque révolutionnaire et napoléonienne. Elle regroupa 34 États monarchiques (35 en 1817), sujets à un processus de modernisation que l’historien allemand Jürgen Osterhammel qualifia de « réinvention de la monarchie ». Après 1815, surtout les Éta...

Le sacre de Judith Le 1er octobre 856 (fête de Saint-Remi) dans la chapelle du palais de Verberie, Hincmar, en sa qualité d’archevêque métropolitain (Verberie se trouvait dans le diocèse de Soissons) procéda au sacre de Judith, fille de Charles le Chauve et d’Ermentrude, à l’issue de la cérémonie de son mariage avec Aethelwulf, roi des Saxons de l’Ouest. Il est admis qu’Hincmar a rédigé l’ordo du sacre, conservé dans un manuscrit liégeois disparu mais publié en 1623 par le Père Jacques Sirm...

Charles V et son épouse Jeanne de Bourbon ont été sacrés le 19 mai 1364 à la cathédrale de Reims. L’événement a déjà été étudié par ceux qui se sont intéressés à la mise en scène du pouvoir politique dans le royaume de France à la fin du Moyen Âge. Si ce sacre s’inscrit dans une tradition héritée des rois bibliques et perpétuée depuis l’époque carolingienne il marque néanmoins une étape importante dans l’histoire du rituel. En effet, l’étude des ordines de couronnement des souverains français...

La ville de Messine fut entièrement détruite par un tremblement de terre en 1908. Seront étudiés ici les différentes politiques qui, dans le contexte plus large de la reconstruction de la ville, aboutirent à la redéfinition des espaces destinés aux structures et aux édifices universitaires. On s’appuiera aussi bien sur l’abondante littérature existante sur le sujet que, plus spécifiquement, sur les informations contenues dans les Annuaires de l’université de Messine ainsi que sur celles tirée...

En novembre 1954, le président du Conseil Pierre Mendès France est en visite dans le Nord de la France. À cette occasion, il préside une séance solennelle lors de la reprise de l’année scolaire et universitaire. Le doyen de la faculté de droit Guy Debeyre, qui remplace le recteur Souriau alors en mission aux États-Unis, explique dans son discours d’accueil le rôle qui devra désormais être celui de l’université : « Pendant trop longtemps l’Université a été absente de la vie, retirée de la soci...

Les mots « malfaisants ou nuisibles » ont été remplacés dans la partie législative du Code de l’environnement par les mots « susceptibles d’occasionner des dégâts » en application de la loi du 8 août 2016 relative à la reconquête de la biodiversité, de la nature, et des paysages (loi « biodiversité »). La modification dans la partie réglementaire de ce Code doit faire l’objet d’un décret en Conseil d’État. La destruction des animaux causant des dégâts, dommages ou nuisances (dénommés « nuisib...

Longtemps considéré comme le refuge de créatures diaboliques le milieu marin a changé progressivement de visage au cours des trois derniers siècles. Ce désenchantement progressif des mondes maritimes, encouragé par les effets de la déchristianisation et l’essor des approches naturalistes, s’est traduit au début de la période contemporaine par l’émergence d’une stricte séparation du vivant entre animaux utiles et animaux nuisibles, désormais légitimée par la littérature scientifique du xixe si...

L’histoire des relations anthropozoologiques du lapin de garenne est longue, singulière et pleine de « rebondissements ». Originaire de la péninsule ibérique, Oryctolagus cuniculus (Linnaeus, 1758) est déplacé par les hommes dès l’Antiquité sur certaines îles de la Méditerranée. À partir du Moyen Âge, le lapin est diffusé par les hommes de manière spectaculaire à travers l’Europe, notamment grâce à la multiplication des garennes. Cette diffusion se poursuivra jusqu’aux temps modernes et conte...

Appréhender les universités au moment de leur création permet de saisir d’emblée la très grande diversité des formes possibles de manifestation spatiale d’une telle présence dans la ville. Il ne s’agit pas ici de revenir sur les différents modèles architecturaux qui existent ou ont pu exister dans le monde et de les comparer, mais d’illustrer, à travers l’histoire singulière de cinq universités, combien, dans chaque cas, le processus de constitution d’un espace universitaire est complexe et p...

Les historiens de l’université ont depuis longtemps reconnu l’importance du lien qui unit leur objet à la ville. Dès 1957, dans son livre consacré aux intellectuels au Moyen Âge, c’est-à-dire essentiellement les universitaires, Jacques Le Goff avait ainsi choisi d’intituler le premier chapitre « Renaissance urbaine et naissance de l’intellectuel au xiie siècle ». Le chapitre s’ouvre par une brève affirmation à la tonalité biblique, résumant le contexte social dans lequel apparaissent les univ...

La loi traduit les représentations, les pratiques, les habitudes des hommes. Depuis longtemps les juristes, le législateur, se sont interrogés sur la façon de définir les « nuisibles ». Si pour certaines espèces, comme le loup, la question est, jusqu’à récemment, tranchée sans débat, pour nombre d’autres elle ne trouve pas de réponse évidente et immédiate. Le législateur, l’administratif et le gestionnaire sont conscients de ces questionnements sur la définition du « nuisible » et sont, depui...

L’expression anglo-saxonne « town and gown » a été maintes fois utilisée pour décrire la problématique de la cohabitation entre sociétés universitaires et sociétés urbaines. Dans son sens le plus courant, elle s’applique à souligner l’inéluctabilité des conflits entre ceux qui portent la gown (robe ou toge, symbole des privilèges de ceux qui se consacrent aux études) et ceux qui ressortent du commun de la ville (artisans, commerçants, habitants) et de son administration (magistrats, policiers...

Tant pour l’histoire urbaine qu’universitaire, la guerre franco-prussienne constitue une rupture pour la ville de Strasbourg. La création du Reichsland Elsass-Lothringen en 1871 confère à la ville le statut de capitale en même temps qu’elle conduit à l’émigration de l’université française de Strasbourg. Ce nouveau contexte incite la chancellerie impériale à approuver, dès l’année suivante, le projet d’extension de la ville et l’inauguration de la Kaiser Wilhelms Universität conçue comme une u...

Au début du xiiie siècle, le processus d’organisation de l’université de Paris dans la capitale va de pair avec celui de son installation dans l’espace urbain. Les frontières de l’espace physique de l’université se définissent graduellement mais ce processus n’a rien de constant ni de sûr. Implanté dans le territoire urbain, le nouveau corps de métier composé en une grande partie d’étrangers, d’hommes jeunes et de clercs, rencontre, souvent, une hostilité des habitants de la ville. Les confli...

« Depuis ma plus tendre enfance, je me suis toujours demandé ce que ça faisait d’être un renard. » Bekoff Marc, Les émotions des animaux, Paris, Payot et Rivages, 2013, p. 185. Entre 1968 et 1998, le renard roux (Vulpes vulpes) vit son existence bouleversée par le retour de la rage en France, maladie dont il devint le principal vecteur et la première victime. Ce ne fut certes pas la première survenue de la rage au sein des populations vulpines françaises mais cette épizootie atteignit des pro...

Lorsque le prince-évêque de Liège, Maximilien-Henri de Bavière, prescrit plusieurs mesures prophylactiques afin de protéger la ville de Huy contre la peste en 1668, il interdit notamment à tous les bourgeois de tenir « chiens, chats, colombes, pigeons, lapins, chèvres, porcs et moutons ni autre sorte de bestes ». Au xviie siècle comme précédemment, les autorités des villes des Pays-Bas et de la principauté de Liège condamnent la circulation de plusieurs animaux dans les rues dès la menace d’u...

Au début du xiiie siècle, l’Universitas est avant toute chose un ensemble de personnes : des maîtres et des élèves qui forment une fédération d’écoles. Ces scholae sont d’abord attachées à tel ou tel maître plutôt qu’à tel ou tel lieu. C’est dans la deuxième moitié du siècle que l’université de Paris crée ses propres lieux et à l’intérieur de ce processus, la construction de ce que l’on a l’habitude de nommer la Sorbonne est un projet qui permet aux séculiers de reprendre l’initiative dans un...

Certains paléontologues estiment d’après l’analyse des peintures préhistoriques, notamment celles de la grotte de Lascaux, que la distinction entre les espèces utiles et inutiles à l’origine de la catégorie juridique des nuisibles était déjà notable. De tout temps, l’homme se verrait donc dans l’impasse de catégoriser le monde animal et végétal en fonction des intérêts qu’il peut en retirer. Peu à peu, cette première classification qui opposait les espèces utiles aux espèces inutiles s’est co...

« Strasbourg, à l’époque de la Réforme, est la conjonction d’une ville et d’un homme ; non seulement d’un homme, mais de plusieurs hommes avec une ville qui les a attirés et dont ils ont fait quelque chose. » Dans sa synthèse, l’historien Jean Rott reconnaît dans la naissance d’une institution d’enseignement, le gymnase de Jean Sturm, le fruit de cette féconde relation entre la ville et certains personnages illustre. Dans cet établissement, berceau de l’université strasbourgeoise, confluèrent...

À la différence des nuisances qui peuvent être perçues par chacun de façon subjective, les « nuisibles » sont une catégorie administrative, une notion juridique qui, en tant que telle, doit laisser des traces dans les fonds des administrations du pouvoir royal, de l’État, conservés aux Archives nationales. Certains animaux dangereux pour l’homme ou préjudiciables à ses activités ont dès l’Antiquité fait l’objet de mesures administratives particulières, protectrices pour l’homme, encourageant ...

Dans le cadre d’un travail à long terme sur les rapports homme/nature et sur l’histoire de la chasse en Camargue, cette communication propose une approche historique et socioécologique de la notion de nuisible, à travers l’analyse comparée de trois espèces animales qui alimentent régulièrement la chronique camarguaise : le lapin de garenne (Oryctolagus cuniculus), le sanglier (Sus scrofa) et le flamant rose (Phoenicopterus roseus). Le lapin, espèce jadis abondante et longtemps considérée à la...

Les parcelles cultivées correspondent à des lieux anthropisés qui ne laissent qu’une place très restreinte à la diversité biologique. La période considérée s’étend du dernier tiers du xixe siècle au début de la décennie 1970-1980. Elle marque un siècle où, pour l’agriculture végétale, le contrôle des êtres vivants a semblé possible. La fin des années 1860 correspond à l’identification, en France, de Phylloxera vastatrix. En ce qui concerne la vulgarisation scientifique, la première revue fran...

La place accordée à la ville dans l’histoire des universités est généralement limitée. Pourtant, l’université est depuis sa naissance, au xiie siècle, une institution exclusivement urbaine et contribue à la fabrique de la ville en suscitant des espaces spécifiques. Saisir la nature spatiale et sociale de ces interactions sur la longue durée, du xiiie au xxie siècle et à l’échelle de l’Europe, est l’objectif de cet ouvrage. Au-delà des périodisations classiques, les dix-sept études réunies ici mobilisent trois grilles de lecture : la première interroge le lien entre ville et université lors des périodes de fondation et de refondation ; la seconde analyse les rapports entre le corps universitaire et les sociétés urbaines ; la dernière s’intéresse à la dissémination de l’université dans la ville, bien antérieure à son développement dans les banlieues des grandes villes européennes à la fin du xxe siècle. Les deux figures du quartier et du campus ne résistent guère à l’analyse historique qui décrit la perméabilité des espaces et la difficulté à séparer les mondes de la ville et de l’université.

La présente contribution se propose de mettre en évidence certains aspects que l’abondante bibliographie consacrée aux espaces universitaires et aux fondations de collèges pour étudiants de Padoue a peu approfondi jusqu’ici. Entre le xive et le xvie siècle, les espaces liés au Studium répartis dans la ville, peu éloignés les uns des autres du point de vue de la zone urbaine considérée, étaient caractérisés par la présence d’un groupe varié et assez dense de collèges pour étudiants : une réali...

Le vocabulaire utilisé pour ces espèces est extrêmement riche et a fait l’objet de nombreuses discussions visant à le « neutraliser » ou à le « démilitariser ». En France, on débat de la traduction d’invasive la plus correcte, certains auteurs proposant une utilisation conjointe des termes d’envahissant et d’invasif, le premier pour désigner les espèces autochtones et le second pour les espèces allochtones, ce qui complique passablement la perception des problèmes posés. Ces questions de voca...

Depuis plus d’un siècle la notion de « nuisible » fait l’objet d’une contestation de plus en plus vive. Pourtant elle connaît une singulière persistance sociale en tant que concept opérationnel qui donne aux hommes une certaine légitimité pour gérer, et souvent détruire, certaines espèces. À l’heure où la France vient d’adopter la loi sur la reconquête de la biodiversité, la question des « nuisibles » reprend une singulière acuité avec la multiplication d’espèces exotiques envahissantes et les vives controverses qui demeurent autour du loup, du renard mais aussi de l’utilisation des insecticides et des herbicides pour se défaire de « gêneurs ». Si la notion de « nuisible » demeure centrale dans la gestion du sauvage par nos sociétés, elle s’avère très variable selon l’époque, l’espèce, le territoire ou le groupe social considéré. Pour dresser un état de la recherche, historiciser cette notion et éclairer les enjeux actuels, il convient de croiser les regards afin de caractériser les différentes conceptions de la notion de « nuisible » qui coexistent actuellement et d’en retracer les origines, tout en s’ouvrant aux acteurs du présent. Ainsi cet ouvrage entend contribuer à explorer les interactions entre les sociétés et la nature, et permettre de mieux saisir leurs coévolutions.