Through the analysis of a wide range of technical sources (patents, treaties, manuals) and artistic sources (plays, “livrets de mise en scène”, iconography), this study proposes an analysis of the emergence of focused light on Parisian stages, and the transformations of the scopic regime specific to the theatre induced by this new lighting. From the 1840s onwards, shows (dramatic, lyrical, or dance) regularly feature "rays of light", produced by optical devices (lenses, streetlights), which make it possible to create directional and focused light. This study examines the aesthetic and technical shifts that led to the adoption and generalization of these effects. The transformations of the paradigm of vision in the 19th century, analysed in particular by Jonathan Crary, make it possible to understand that the contrasts of light, very popular from the 1800s onwards, particularly in melodramas and romantic dramas, testify to a paradigm shift in theatre: the construction of a view of the stage, through the use of light, is gradually becoming imperative. It is in this context that the pattern of the ray emerges in the romantic imagination, first as a metaphor for vision and drama, then as a staged light effect. From the 1850s, the advent of the first electric and limelight projectors made it possible to multiply the effects of focused light, whose uses were gradually codified. On the one hand, focused light is used as a disciplinary device and imposes itself as a means of controlling specifically the attention paid to the stage, thus contributing to the long movement of pacification of the spectators during the century. But it also allows a sharpened gaze: the projector thus becomes the means of instrumenting the spectator's eye to give him to see what he would not otherwise have noticed: the details, the signs, the clues. Thus the "ray" participates in the implementation of the "conjectural paradigm" in the theatre, which Jean-Pierre Sarrazac described in particular on the basis of Carlo Ginzburg's work. On the other hand, focused light is used to transform bodies through technology, especially those of fantastic creatures and women. It thus becomes an instrument for the production of otherness; it allows the production of bodies conforming to gender categories. From this point of view, the ray makes it possible to start thinking about thelinks between light and matter as early as in the 1850s. Practitioners then experiment with different uses of light: some are based on objectification, as defined by Sandra Lee Bartky in particular; others, particularly the work of Loïe Fuller, invent new ways of staging focused light. The appendix volume of this thesis contains lists of light indications in 19th century staging booklets, including the Palianti collection and the collections of the Association de la Régie théâtrale., À travers l’analyse d’un vaste éventail de sources techniques (brevets, traités, manuels) et artistiques (pièces de théâtre, relevés et livrets de mise en scène, iconographie), cette étude propose une analyse de l’apparition de la lumière focalisée sur les scènes parisiennes, et des transformations du régime scopique propre au théâtre qu’induit ce nouvel éclairage. À partir des années 1840, en effet, les spectacles (dramatiques, lyriques, ou de danse) mettent régulièrement en scène des « rayons de lumière », produits par des dispositifs optiques (lentille, réverbères), qui permettent de créer une lumière directionnelle et focalisée. Cette étude interroge les bouleversements esthétiques et techniques qui ont mené à l’adoption, puis à la généralisation, de ces effets. Les transformations du paradigme de la vision au XIXe siècle, analysées notamment par Jonathan Crary, permettent en effet de comprendre que les contrastes de lumière, très en vogue à partir des années 1800 notamment dans les mélodrames et les drames romantiques, témoignent d’un changement de paradigme au théâtre : la construction d’un regard sur la scène, par l’emploi de la lumière, s’impose progressivement. C’est dans ce contexte que le motif du rayon émerge dans l’imaginaire romantique, d’abord comme métaphore de la vision et du drame, puis comme effet de lumière mis en scène. À partir des années 1850, l’apparition des premiers projecteurs électriques et oxhydriques permet de multiplier les effets de lumière focalisée, dont les usages se codifient peu à peu. D’une part, la lumière focalisée est utilisée comme dispositif disciplinaire et s’impose comme un moyen de contrôler spécifiquement l’attention portée à la scène, participant en cela au long mouvement de pacification des spectateurs au cours du siècle. Mais elle permet aussi d’aiguiser le regard : le projecteur devient ainsi le moyen d’instrumenter l’oeil du spectateur pour lui donner à voir ce qu’il n’aurait, sans cela, pas remarqué : les détails, les signes, les indices. Ainsi le « rayon » participe-t-il à la mise en place du « paradigme indiciaire » au théâtre, qu’a notamment décrit Jean-Pierre Sarrazac en s’appuyant sur les travaux de Carlo Ginzburg. D’autre part, la lumière focalisée est utilisée pour transformer les corps par la technologie, notamment ceux des créatures fantastiques et des femmes. Elle devient ainsi un instrument de production de l’altérité ; elle permet de produire des corps conformes aux catégories de genre. De ce point de vue, le rayon permet d’amorcer dès les années 1850 une réflexion sur les liens entre lumière et matière. Les praticiens expérimentent alors avec différents usages de la lumière : certains se font sur le mode de l’objectification, telle que définie notamment par Sandra Lee Bartky ;d’autres, particulièrement l’oeuvre de Loïe Fuller, inventent de nouvelles modalités de mise en scène de la focalisation. Le volume d’annexe de cette thèse contient des relevés d’indications de lumière dans des livrets de mise en scène du XIXe siècle, notamment la collection Palianti et les fonds de l’Association de la Régie Théâtrale.