En étudiant les variations génétiques au sein d'une population, il est possible d'identifier des polymorphismes génétiques qui confèrent une protection naturelle contre la maladie. Si l'on parvient à comprendre le mécanisme moléculaire qui sous-tend cette protection, par exemple en reliant la variation génétique à la perturbation d'une protéine bien précise, il pourrait être possible de développer des thérapies pharmacologiques qui agissent sur la même cible biologique. Cette relation entre les médicaments et les variations génétiques est une des prémisses centrales de la validation génétique de cibles pharmacologiques qui est un facteur de réussite dans le développement de médicaments. Dans cette thèse, nous utiliserons un modèle génétique pour prédire les effets bénéfiques et indésirables de l'ivabradine, un médicament utilisé afin de réduire la fréquence cardiaque. L'ivabradine est un inhibiteur du canal ionique potassium/sodium hyperpolarization-activated cyclic nucleotide-gated channel 4, encodé par le gène HCN4, dont les bénéfices sont hétérogènes chez différentes populations de patients. Ce médicament est efficace pour le traitement de l'angine et de l'insuffisance cardiaque, mais s'est avéré inefficace en prévention secondaire chez des patients coronariens stables sans dysfonction systolique. La caractérisation des effets de l'ivabradine s'est échelonnée sur une période de 6 ans et trois grands essais de phase III ont été menées. Nous étudierons la possibilité d'avoir prédit ou accéléré ce processus à l'aide de modèles génétiques et nous contrasterons les effets spécifiques à l'ivabradine des effets généraux de la réduction de la fréquence cardiaque par une approche de randomisation mendélienne. Deuxièmement, une approche génétique sera utilisée pour évaluer l'effet de l'inhibition de la cholesteryl ester tranfer protein (CETP), une enzyme responsable du transfert des cholestérols estérifiés et des triglycérides entre différentes lipoprotéines ainsi qu'une cible pharmacologique largement étudiée pour le traitement de la maladie coronarienne. Les études génétiques prédisent un bénéfice à l'inhibition de CETP, mais les essais randomisés ont eu des résultats hétérogènes et décevants. Nous utiliserons un modèle génétique d'inhibition de la CETP pour identifier des variables qui peuvent moduler l'effet de l'inhibition de la CETP sur des biomarqueurs et la maladie ischémique. Les biomarqueurs pris en compte comprennent les taux de cholestérol à lipoprotéines de basse et haute densité, mais aussi la capacité du plasma à absorber le cholestérol, une mesure fonctionnelle importante et sous-étudiée. Le sexe et l'indice de masse corporelle se sont avérés être deux variables qui modifient fortement les effets d'une réduction génétiquement prédite de la concentration de CETP sur les paramètres étudiés. Notre modèle prédit un bénéfice plus important de l'inhibition de la CETP pour les femmes et les individus ayant un indice de masse corporelle normal sur le profil lipidique, mais nous n'avons pas pu démontrer une modulation de l'effet sur la maladie ischémique. Cette étude reste importante sur le plan méthodologique, car elle soulève la possibilité d'utiliser des modèles génétiques de cibles pharmacologiques pour prédire l'hétérogénéité dans la réponse au médicament, une lacune des essais randomisés classiques. Enfin, nous avons adopté une approche centrée sur les gènes pour caractériser l'effet de 19 114 protéines humaines sur 1 210 phénotypes de la UK Biobank. Les résultats de cette étude sont accessibles au public (https://exphewas.statgen.org/) et constituent une ressource précieuse pour cerner rapidement les conséquences phénotypiques associées à un locus. Dans le contexte de validation de cibles pharmacologiques, cette plate-forme web peut aider à rapidement identifier les problèmes de sécurité potentiels ou à découvrir des possibilités de repositionnement du médicament. Un exemple d'utilisation de cette plate-forme est présenté où nous identifions le gène de la myotiline comme un nouvel acteur potentiel dans la pathogénèse de la fibrillation auriculaire., Using population-level data, it is possible to identify genetic polymorphisms that confer natural protection against disease. If the molecular mechanism underlying this protection can be understood, for example by linking variants to the disruption of a particular protein, it may be possible to develop drugs that act on the same biological target. This link between drugs and variants is a central premise of genetic drug target validation. In this work, a genetic model is used to predict the beneficial and adverse effects of ivabradine, a drug used to lower heart rate. Ivabradine is an inhibitor of the ion channel potassium/sodium hyperpolarization-activated cyclic nucleotide-gated channel 4, encoded by the HCN4 gene, with heterogeneous benefits in different patient populations. This drug is effective in the treatment of angina and heart failure but it is ineffective in patients with stable coronary artery disease without systolic dysfunction. Characterization of the effect of ivabradine has occurred over a 6-year period and three large phase III trials have been conducted. We will investigate whether this process could have been streamlined using genetic models and contrast the ivabradine-specific effect with the general effect of heart rate reduction using a Mendelian Randomization approach. Second, a genetic approach is used to study the effect of inhibiting cholesteryl ester tranfer protein (CETP), an enzyme responsible for the transfer of cholestery esters and triglycerides between different lipoproteins and a widely studied drug target for the treatment of coronary artery disease. Genetic studies predict a benefit of CETP inhibition, but randomized trials yielded heterogeneous and disappointing results. We will use a genetic model of CETP inhibition to identify variables that may modulate the effect of CETP inhibition on biomarkers and ischemic disease. The biomarkers we considered included low- and high-density lipoprotein cholesterol levels but also the plasma cholesterol efflux capacity, an important and understudied functional measure of high density lipoproteins. Sex and body mass index strongly modulated the effect of a genetically predicted lower CETP concentration on the lipid profile. Our model predicts a greater benefit of CETP inhibition in women and individuals with normal body mass index on the lipid profile, but these observations did not translate to changes in the effect on cardiovascular outcomes. This study remains methodologically important because it demonstrates the possibility of using genetic models of drug targets to predict heterogeneity in drug response, a shortcoming of conventional randomized trials. Finally, we adopted a gene-centric approach to characterize the effect of 19,114 human protein-coding genes on 1,210 UK Biobank phenotypes. The results of this study are publicly available (https://exphewas.statgen.org/) and provide a valuable resource to rapidly screen the phenotypic consequences associated with a gene. In the context of drug target validation, this platform can help quickly identify potential safety issues or discover drug repurposing opportunities. An example of the use of this platform is presented where we identify the myotilin gene as a potential atrial fibrillation gene.