National audience; La mythologie pour le droit. A la lecture du programme de cette matinée, il semblerait ainsi que le sens de la peine serait donc un mythe, au service du droit. Ainsi présentée, notre intervention pourrait tourner court, tant il n'y aurait que peu à dire, une fois le postulat rappelé. Toutefois, et l'on décèle ici l'ingéniosité des organisateurs de colloque, la question est loin de se résumer à la seule existence de ce mythe, que l'on pourrait décrire, tant les interrogations portant sur le sens de la peine sont nombreuses, certains s'interrogeant même sur le point de savoir si la peine a un sens. La réponse à cette question est éminemment difficile, d'abord car « la peine » recouvre une réalité bien plus riche qu'il n'y paraît, et sans doute impossible à réduire à une simple catégorie de mesures qui poursuivraient le même objectif, qui auraient le même sens. En effet, la peine renvoie presque instinctivement à la peine privative de liberté, à l'emprisonnement ou à la réclusion criminelle, peine principale et de référence des crimes et de la plupart des délits. L'on pense ensuite à la peine d'amende, cette autre peine principale et de référence, cette seule autre peine principale et de référence puisque la contrainte pénale, dite encore la peine de probation n'a pas pu ou su accéder à ce rang lors de la réforme du 15 août 2014 (si on laisse de côté le TIG pour le tag). Mais l'on pense aussi à l'ensemble des peines visées par l'article 131-3, à savoir la contrainte pénale, le jour-amende, le stage de citoyenneté, le travail d'intérêt général, certaines peines privatives ou restrictives de droits (l'article 131-6 en liste 15), qui peuvent être prononcées à titre principal, mais aussi les peines complémentaires, ou la sanction-réparation. L'on devine alors que le sens de la peine de réclusion criminelle est sans doute différent de celui de la sanction-réparation, ou de celui du retrait de permis de chasse (131-6, 8°). Et que dire alors de la dispense de peine, qui est prononcée à titre de « peine », selon les modalités prévues par l'article 132-59 du Code pénal ? Pourtant, sans distinguer selon la peine en cause, le nouvel article 130-1 du Code pénal, issu de la réforme du 15 août 2014, prévoit que, « afin d'assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l'équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime, la peine a pour fonctions : 1° De sanctionner l'auteur de l'infraction ; 2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion ». Ainsi, selon ce texte, pour répondre à certains objectifs (la protection de la société et la prévention de la récidive), la peine doit être punitive et resocialisante. On s'interroge immédiatement sur la punition résultant d'une dispense de peine. On s'interroge surtout sur le point de savoir si ces fonctions correspondent au sens de la peine. Le sens de la peine se résumerait-il à ses fonctions ? Pour définir le sens de la peine, il est classique de revenir sur le sens des termes en présence. Dans son acception commune, le sens est « la signification qu'a une chose pour une personne et qui en constitue la justification », mais c'est aussi la direction, l'orientation que l'on souhaite donner à quelque chose. La peine, vient du grec poids, c'est un fardeau porté par le délinquant, c'est la sanction pénale infligée au délinquant en réponse à l'infraction commise. Le sens de la peine pourrait, selon ces définitions, recouvrir deux significations : le sens que la personne condamnée trouve dans la sanction prononcée à son encontre ou le sens que la personne qui l'établit et/ou la prononce souhaite donner à la peine. Le sens de la peine pourrait donc rejoindre le rôle qui lui est alloué par la société, en espérant que ce rôle soit compris et accepté par le délinquant, objet de la sanction.