Les biens des émigrants. Représentation et interchangeabilité dans des communautés de la Suisse italienne (xviie-xviiie siècles)

Cette contribution étudie le fonctionnement de communautés concernées par les départs des émigrants dans les bailliages communs de l’ancienne Confédération helvétique sous l’Ancien Régime. Ces territoires soumis à la domination de douze des treize cantons confédérés pendant l’époque moderne (aujourd’hui Suisse italienne) représentent un cadre privilégié pour l’étude des phénomènes migratoires et des enjeux de l’absence. Bénéficiant d’une certaine autonomie à l’égard des cantons souverains, les communautés jouissent de compétences importantes leur permettant d’intervenir dans la gestion des biens des émigrants, ainsi que dans leur représentation. Les décisions prises par les assemblées vicinales attestent d’une implication active dans la tutelle des maisons, en confiant la représentation des absents en particulier à des familles de notables. La délégation que ces dernières reçoivent de représenter les émigrants leur confère une autorité considérable, puisqu’elles obtiennent la faculté de préserver des patrimoines et des droits menacés par l’absence. L’interchangeabilité des membres de la communauté assure ainsi l’accomplissement des obligations réciproques et le maintien des liens sociaux dans un contexte de mobilité accrue. This contribution is devoted to the way the communities of the common bailiwicks of the former Helvetic Confederation dealt with their members’ emigration under the Ancien Régime. These territories, under the domination of twelve of the thirteen Confederate cantons during the modern era (nowadays Italian Switzerland), represent a privileged frame for the study of the migratory phenomena and the issues of the absence. Benefiting from a certain autonomy with regard to the sovereign cantons, the communities enjoyed important competences allowing them to intervene in the management of their emigrants’ assets, as well as in their representation. The decisions taken by the vicinal assemblies attest to an active involvement in the guardianship of the emigrants’ houses, in particular by entrusting the agency over the latter’s assets to pre-eminent families. The delegation they received to represent emigrants provided these families with considerable authority, since they had the power to preserve patrimonies and rights threatened by absence. The interchangeability of community members thus ensured the fulfillment of mutual obligations and the maintenance of social ties in a context of increased mobility.