L’ambivalence du silence en politique : du mutisme à la démocratie

Le silence est très certainement un élément majeur de l’expérience spirituelle, en ce qu’il nous permet de résonner avec l’expérience du monde. Il constitue ce recueillement en soi qui est aussi la redécouverte du Tout et de la liaison des éléments entre eux. Une attention spécifique à son infiniment petit pour atteindre l’écho de l’infiniment grand. Cependant, ce qui semble vrai dans l’expérience spirituelle, l’est moins dans le champ politique. Dans une société démocratique basée sur la transparence, le silence revêt une connotation plus péjorative. La délibération n’est pas silence, car le silence rime avec secret. La représentation n’est pas silence, car au contraire les positions doivent être explicites et dites, au vu et au su de tous. Le silence appliqué au champ politique renvoie à la mise au silence, ou la « fameuse conspiration du silence », que dénonçait Auguste Comte en son temps. Mais si nous devions trouver une vertu au silence en politique, nous dirions que le fonctionnement même de la démocratie a besoin de respiration, temps de la latence qu’elle peut trouver dans un recueillement orienté auprès d’une certaine forme d’indicible.