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En 1934, les époux Bloch visitent l’URSS. De là-bas Marguerite envoie nombre de lettres, enthousiastes pour la plupart, et qui passent sous silence certains doutes exprimés dans le carnet de notes de la voyageuse. Le travail du couple étant organisé selon une logique genrée très nette, Jean-Richard, lui, s’appuie sur les lettres de sa femme pour rédiger une série d’articles, certains envoyés d’URSS ou publiés en URSS, d’autres publiés après le séjour (dans la revue Europe notamment). Au-delà des échos et des reprises, cependant, du témoignage privé de Marguerite à la parole publique de Jean-Richard, on passe d’une poétique de l’anecdotique à une logique du commentaire politique. In 1934, Marguerite and Jean-Richard Bloch visited the USSR. From there Marguerite sends numerous letters, most of them enthusiastic, and which overlook some of the doubts expressed in her notebook. The couple’s work being organized according to a very clear gendered logic, Jean-Richard, for his part, relies on his wife’s letters to write a series of articles, some sent from or published in the USSR, others published after the stay (in the magazine Europe in particular). Beyond the echoes and repetitions, however, from Marguerite’s private testimony to Jean-Richard’s public speech, we move from a poetics of anecdotal to a logic of political commentary.

Le paradigme économique, souvent employé dans le champ de la morale pour définir l’amitié, fonctionne à l’intérieur de l’oeuvre épistolaire de Mme de Sévigné comme un détour privilégié pour aborder la spécificité de l’échange intime. La correspondance sévignéenne révèle une vision pragmatique de l’amitié conçue comme un système d’échanges, voire une entreprise rentable. Le commerce épistolaire fonde ainsi une économie propre de l’amitié.

Au donjon de Vincennes, la correspondance de Mirabeau et Sade est contrainte et profanée au profit de la sûreté carcérale. Néanmoins, leur écriture épistolaire, soumise au secret absolu, s’appuie sur des stratégies de dissimulation (lettres clandestines, stéganographie, cryptographie…). Duper le censeur préserve ainsi une part de liberté et donne du pouvoir à l’épistolier captif, qui devient, au sens de Louis Marin, « maître du secret ».

Histoire, droit, botanique, les travaux savants de Malesherbes n’ont jamais été publiés, sinon par bribes. Les études rassemblées ici permettent d’abord de situer l’homme dans la vie intellectuelle des Lumières ; les lettres et mémoires inédits illustrent ses centres d’intérêt et ses convictions., Malesherbes’ scholarly works on history, law and botany have never been published, except in bits and pieces. The studies gathered here first allow us to situate the man in the intellectual life of the Enlightenment; the unpublished letters and memoirs illustrate his interests and convictions.

Dans une grande majorité de ses films, Arnaud Desplechin met en scène une lettre oralisée par un acteur face caméra. Ce procédé est une réminiscence de certains films de Bergman (Les Communiants, Sonate d’automne) et Truffaut (Les Deux Anglaises et le Continent, L’Histoire d’Adèle H.). Il permet notamment de donner à entendre l’intériorité des personnages, mais l’effraction du regard caméra lui donne aussi une frontalité qui peut conduire au malaise. Il est enfin pour Desplechin le moyen maniériste tout à la fois de s’inscrire dans la filiation de ses aînés et de se distinguer d’eux en proposant des variations du procédé. In most of Arnaud Desplechin’s films, a letter is verbalized by an actor facing the camera. It’s a reminiscence of Bergman’s films (Winter’s Light, Autumn Sonata) and Truffaut (Two English Girls, The Story of Adèle H.) The characters interiority can be in this way heard and understood, but the look to camera can also be a frontal and awkward breaking into the audience’s space. The epistolary look is for Desplechin at the same time a mannerist way to be in line with his elders and to be different from them by proposing variations.

Amitié, correspondance, littérature: c’est cette triade qui est au cœur de ce volume. Existe-t-il une rhétorique épistolaire de l’amitié? La correspondance, en tant que canal de communication, modifie-t-elle la nature même de l’amitié? L’amitié littéraire est-elle en elle-même un art social? Et surtout, l’amitié épistolaire comporte-t-elle, quand elle unit deux écrivains, une dimension littéraire qui déteint sur les œuvres de celles et/ou ceux qu’elle unit? Telles sont les questions centrales de cet ouvrage collectif. Friendship, correspondence, literature: this triad is at the heart of this volume. Is there an epistolary rhetoric of friendship? Does correspondence, as a channel of communication, change the very nature of friendship? Is literary friendship itself a social art? And above all, does epistolary friendship, when it unites two writers, include a literary dimension that rubs off on the works of those whom it unites? These are the central questions of this collective work.

En 1914, pour expliquer à Proust sa réticence ou sa méfiance à l’égard du manuscrit de Du côté de chez Swann, Gide utilise un argument qui, compte tenu de ce que nous venons de voir, semble relever d’une particulière mauvaise foi : « Pour moi, vous étiez resté celui qui fréquente chez Mme X ou Y, et celui qui écrit dans Le Figaro. Je vous croyais, vous l’avouerai-je, du côté de chez Verdurin ! un snob, un mondain amateur, – quelque chose d’on ne peut plus fâcheux pour notre revue. » Or Gide, ...

GIDE QUI RIT, PROUST QUI PLEURE En 1918, Gide nage dans le bonheur, grâce à sa relation avec Marc Allégret qui s’épanouit lors de leur séjour en Angleterre de juin à septembre. Il surmontera bientôt le marasme dans lequel le plonge la découverte à son retour de la destruction vengeresse, par Madeleine, des lettres qu’il lui avait adressées depuis plus de vingt ans. À partir de février 1919, il se ressaisit : l’amour pour Marc, la fin de la guerre, la reprise de La NRF, tout le pousse à croire...

C’est sur un fond de compréhension proche de la complicité – chacun des deux écrivains semblant se reconnaître dans l’œuvre de l’autre – que l’on peut expliquer que, à peine plus de deux mois après la première lettre de Gide, ils se trouvent déjà lancés dans les confidences voilées et les protestations de dévouement. On sait que Proust pouvait grimper aisément dans ce registre, mais c’était beaucoup moins la manière de Gide, et il est donc étonnant de les voir jouer à l’unisson une même parti...

Retraçant le tortueux « itinéraire intellectuel » de Gide depuis la débâcle jusqu’à l’épuration, cet ouvrage examine le rôle ambigu du doyen des lettres françaises au cours de la Seconde Guerre mondiale. Évitant les lectures simplistes ou partisanes qui classent sommairement l’écrivain soit comme collaborateur soit comme résistant, cette étude des écrits de guerre négligés de Gide se concentre sur l’ambivalence politique profonde de l’auteur et sur ses efforts non reconnus pour se réinventer ...

ENFANCES De ces deux écrivains que la légende oppose, il n’est pas si paradoxal de considérer les trajectoires comme d’approximatives parallèles, situées de part et d’autre de la Seine, cette ligne de démarcation qu’ils devaient franchir plus souvent qu’on ne croit. Nés à deux ans d’intervalle, à Paris, dans des familles de la grande bourgeoisie, à l’orée de la IIIe République, ils sont tous les deux des enfants privilégiés, assurés de pouvoir un jour choisir librement l’emploi de leur temps,...

DU CÔTÉ DE CHEZ GIDE En dépit de ses déclarations de plus en plus explicites, au moins jusqu’en 1920 environ, Gide a vécu sa sexualité avec un sentiment complexe, fait d’orgueil apparent et de culpabilité latente, ce qui l’incite à considérer son œuvre comme une entreprise de légitimation de ses désirs. Déjà, dans Les Nourritures terrestres, on pouvait lire cet aveu presque cynique : « Certes, il m’a plu souvent qu’une doctrine et même qu’un système complet de pensées ordonnées justifiât à mo...

PREMIÈRES VISITES La guerre éclate, qui apparemment interrompt leurs échanges. Bien qu’ils soient tous deux à Paris, Proust à demi-reclus, Gide accaparé d’octobre 1914 à septembre 1915 au Foyer franco-belge, les deux écrivains ne semblent pas avoir eu d’échanges, mais ils n’étaient pas forcément sans nouvelles l’un de l’autre ; Gide, au Foyer, où il se consacrait à l’accueil des réfugiés qui avaient fui l’avancée des troupes allemandes, avait parfois comme collaborateurs des figures du Tout-P...

Dans le rêve complexe évoqué au chapitre précédent, Proust tient le rôle d’un roi menacé, et Gide celui d’un agresseur torturé. Proust est un « grand seigneur », cette qualité se reconnaissant à sa domesticité avant d’être confirmée par ses manières. Au « domestique en livrée » succède un « majordome vêtu d’une longue redingote verte et noire » (RR2, p. 546-547) ; cette tenue fait songer à l’habit des académiciens, ce qui instaurerait Proust en prince des lettres. Assis « sur un simple escabe...

Écoutons ce que Dostoïevski dit des rêves [...] « Pourquoi [...] quand vous vous réveillez et rentrez dans le monde, sentez-vous presque toujours [...] que le songe en vous quittant emporte comme une énigme indevinée par vous ? »(André Gide, « Dostoïevski », EC, p. 556) GIDE À ANNECY Annecy, 5 mars 1923. André Gide se réveille. Il sort d’un rêve étrange, dont le souvenir précis se prolonge, et qu’il va devoir noter, comme il le fait parfois. De la fenêtre de sa chambre, toute proche du lac, i...

Homme de lettres au rayonnement sans égal en France pendant les premières décennies du xxe siècle, André Gide devient une figure contestée mais emblématique pendant la Seconde Guerre mondiale. Ses écrits de guerre proposent une image exemplaire des défis auxquels fait face un écrivain majeur en période d’effondrement national. Retraçant le tortueux « itinéraire intellectuel » de Gide à partir de la débâcle jusqu’à l’épuration, cet ouvrage examine le rôle ambigu du doyen des lettres françaises, dont les manœuvres complexes permettent d’aborder de façon privilégiée trois questions de grande importance : la relation entre littérature et politique pendant la Seconde Guerre mondiale, les refoulements et les repositionnements qui continuent à alimenter la controverse à propos de cette période, enfin le rôle des intellectuels reconnus en temps de crise nationale. À l’exception du Journal datant du début de la guerre, la critique s’est peu intéressée aux publications de Gide pendant les années sombres. Jocelyn Van Tuyl scrute tous ces textes en détail, retrace l’évolution des opinions politiques de Gide et, surtout, lit ces écrits de guerre les uns à la lumière des autres. Car c’est l’interaction entre ces textes qui révèle toute la complexité des positions politiques de Gide et la virtuosité rhétorique que l’auteur déploie pour redresser son image ternie.

LA CHANCE DE GIDE Peut-être Gide aurait-il longtemps stagné dans la brume dorée des salons si, à la différence de Proust, il n’avait eu la chance de commencer sa carrière par un coup d’éclat involontaire. Certes, son premier livre, Les Cahiers d’André Walter, le posait comme un espoir de la nouvelle génération d’écrivains, mais cette perspective serait restée vaine sans l’intervention providentielle d’un bon génie. Il s’agit de Maurice Barrès dont Gide, porté par son admiration pour l’auteur ...

« Il y a trois puissances en France : la banque, le parti communiste et La NRF, aurait dit l’ambassadeur allemand Otto Abetz en arrivant à Paris en 1940, commençons par La NRF. » À l’époque, La NRF, cofondée par André Gide en 1908, exerce une influence considérable : mondialement connue et de caractère essentiellement littéraire, la revue mensuelle est aussi un lieu d’expression pour toutes les opinions politiques. À la suite de la Première Guerre mondiale, la revue encourage le rapprochement...

LE COMPLEXE DE CAÏN Il y a, éparses dans l’œuvre de Gide, quelques manifestations d’un complexe de Caïn, le plus souvent exprimées de manière détournée. On pourrait considérer comme un signal prémonitoire le fait que, dans La Porte étroite, le héros s’adresse à son ami Abel, dont il a causé indirectement le malheur, en l’appelant « mon pauvre frère ». Emblématique en revanche est le cas d’Émile Ambresin, ce fils de pasteur, engagé comme camarade de vacances du jeune Gide et devenu son ami, qu...

SWANN CHEZ GRASSET : REMUE-MÉNAGE À LA NRF Après avoir à nouveau séjourné en Italie en juillet-août, Gide achève les Caves. En novembre, tandis qu’il publie dans La NRF ses Souvenirs de la cour d’assises, paraît enfin Du côté de chez Swann. Les réactions de la critique à propos de cet auteur à peine connu sont évidemment peu nombreuses, certaines très hostiles, comme celle de Paul Souday dans Le Temps, mais plusieurs fort élogieuses, comme celle de Maurice Rostand dans Comœdia, et celle de Lu...

À la veille de la Seconde Guerre mondiale, un sentiment de fin plane sur la vie personnelle et professionnelle d’André Gide. L’écrivain a presque 70 ans ; ses principales œuvres littéraires (à l’exception de Thésée) sont derrière lui ; et il s’abstient de tout engagement politique depuis la publication du Retour de l’URSS et des Retouches à mon retour de l’URSS. Son épouse Madeleine – dont il est séparé depuis longtemps, mais qui continue d’occuper une place importante dans sa vie affective e...

L’itinéraire des deux nouveaux bacheliers diverge un bref moment : tandis que Proust s’engage sous les drapeaux, pour un an de service militaire, Gide s’engage sous la loi de l’amour, en écrivant Les Cahiers d’André Walter qui devraient, du moins il l’espère, convaincre sa cousine Madeleine de l’épouser. Mais ces deux tâches accomplies, les deux jeunes gens reviennent à leurs entreprises éditoriales. Officiellement, ils sont étudiants, mais surtout parce qu’il faut bien rassurer les parents. ...

En 1944, pendant une brève période, il semble probable qu’André Gide effectue un retour rapide et triomphant au sein de l’élite intellectuelle de la France métropolitaine. À cette époque, on projette de renouveler l’Académie française en remplaçant les partisans actifs ou passifs de Vichy et de l’Allemagne – dont beaucoup sont des intellectuels médiocres – par des écrivains de premier ordre non associés à la collaboration. Or, selon les rumeurs qui circulent dans Paris libéré, Gide serait d’a...

GIDE À CONTRE-PIED Le 28 avril 1921, après avoir exprimé son admiration pour le Côté de Guermantes qui vient de paraître, Gide réclame à Proust une entrevue, en des termes un peu pathétiques : « J’ai si grand désir de vous voir ! N’ai-je pas mérité de vous connaître un peu davantage ? Par pitié, si l’asthme vous laisse un peu de répit, faites-moi signe. [...] Vous savez bien pourtant que ce n’est pas en littérateur que je viendrais m’asseoir un moment près de vous – mais en ami. » La parution...

Il semble qu’après de telles marques d’admiration, Gide aurait pu se sentir quitte à l’égard de Proust. Après tout, sans son intervention en 1914, celui-ci ne serait peut-être pas revenu dans le giron de la NRF, revue et maison d’édition, et sans doute son œuvre ne se serait-elle pas imposée aussi vite. Et pourtant, avant même le rêve d’Annecy, un texte nous montre que Gide n’est pas en paix à l’égard de Proust, ni avec lui-même. À LA RECHERCHE D’UN PROUST INCONNU 11 décembre 1922 : Marcel Pr...

Le refus de Swann par La NRF, redisons-le clairement, fut un malentendu ou, plus exactement, un « mal lu ». Mais expliquer les diverses raisons de cette erreur, en exposer les rouages assez évidents, c’est mettre d’autant mieux en évidence un élément qui relève de la psychologie : cette erreur a été vécue par Gide, consciemment, comme une faute grave, et inconsciemment, comme une agression coupable, ainsi que le rêve de 1923 le révèle. ÉTAT DES LIEUX : LA NRF EN 1912 Pour connaître les respon...

Au printemps 1942, les pénuries alimentaires et les attaques permanentes dans la presse poussent Gide à quitter la France pour la Tunisie. Le libraire tunisois Marcel Tournier, avec qui Gide s’est lié d’amitié pendant son voyage en Afrique du Nord en 1923, joue un rôle clé dans l’organisation de ce départ. Au cours d’une visite à Nice en mars 1942, Tournier trouve l’écrivain amaigri et anxieux : « Ici, me dit-il, je ne me sens plus en sûreté. La presse continue à se déchaîner contre moi ; on ...

LES SOUS-ENTENDUS DE PROUST Si les sentiments de Gide sont complexes, ceux de Proust ne le sont pas moins. Par moments, on pourrait penser que chacun de ces deux hommes trouve en l’autre des raisons pour le détester. Et, à d’autres moments, qu’un magnétisme les pousse à s’intéresser l’un à l’autre. Leurs œuvres sont tellement différentes qu’on a du mal à croire qu’ils puissent vraiment se comprendre, et pourtant ils ne cessent de rechercher les occasions de s’expliquer. Dans ce duel, ou cette...

L’empathie face à la souffrance physique de l’autre semble ne pas être une expérience commune au xviie siècle. Le corps malmené, sujet réputé bas dans la culture de l’époque, est plutôt représenté par la littérature comique. La tonalité comique est également présente dans les écrits épistolaires, que ce soit par convention littéraire ou par affirmation d’une posture sociale d’impassibilité. Il est donc intéressant d’observer, dans les lettres où Madame de Sévigné relate les diverses phases de la répression de la révolte bretonne des « bonnets rouges », les signes ambivalents de l’empathie. Le style comique de l’épistolière évolue au fil de la chronique, passant de la dérision à l’ironie et à l’humour, modes de communication propices à la double entente : le ou la destinataire peut ainsi saisir l’indignation et la compassion sous le couvert de la plaisanterie. Ce cas peut mettre du trouble dans une vision historique qui tiendrait pour un fait acquis l’insensibilisation de la société d’Ancien Régime sur la base de documents considérés comme objectifs. Empathy towards the physical suffering of the other seems to not be a common experience in 17th century. Mistreatments of the body, considered as a low topic in the culture of the time, were rather represented by comic literature. The comic tonality is also present in epistolary writings, whether by literary convention or the affirmation of a social posture of impassivity. It is therefore interesting to observe, in the letters in which Madame de Sévigné relates the various phases of the repression of the Breton revolt of the “bonnets rouges”, the ambivalent signs of empathy. Her comic style evolves throughout the chronicle, moving from derision to irony and humour, that induce the reader to read between the lines: he (or she) can hear indignation and compassion under the guise of a joke. This exemple may disturb a historical vision based on “objective documents” that would take for granted the insensitivity of Ancien Régime.

International audience; Après avoir situé notre approche des phénomènes de récurrence discursive, nous présentons les routines épistolaires attestées par un corpus de correspondances peu lettrées de la Première Guerre mondiale et proposons d’appréhender les variations qu’introduisent certains épistoliers comme des modulations stylistiques. Si l’analyse outillée permet de démontrer l’existence de préconstruits discursifs, caractéristiques du genre épistolaire, elle met en effet aussi en évidence la capacité des scripteurs à sortir de la routine, à personnaliser l’expression de leurs sentiments à l’égard de leur famille et de leurs amis et à tracer leur cheminement singulier dans l’écriture. Par une exploration minutieuse de chaque sous-corpus, il semblerait possible d’observer, non seulement dans les ouvertures et les clôtures, mais aussi dans l’ensemble de la lettre, une co-construction discursive, portée par le double ressort de l’imitation de l’autre et de l’invention personnelle, dans une dialectique de la routine et du style.

L’article présente un bref aperçu historique sur l’origine et les vicissitudes de la collection d’autographes épistolaires de Lope, en utilisant de nouveaux documents qui n’avaient pas été pris en consideration jusqu’à maintenant, et des données que nous connaissons à l’heure actuelle, depuis que le premier codex de la correspondance a été acquis par le État espagnol en 2018. L’étude du codex nous permet de mettre en évidence certaines particularités, que ce soit dans le codex ou dans l’ensemble de la collection, notamment l’intervention du duc de Sessa sur les autographes eux-mêmes. The article presents a brief historical account about the origin and the vicissitudes regarding Lope's collection of epistolary autographs, making use of new documents that had not been taken into consideration and the datum that we know right now since the first codex of letters was acquired by the Spanish State in 2018. A study of the codex allows us to highlight some of the peculiarities either in the codex or in the collection as a whole, especially the intervention of the Duke of Sessa on the autographs themselves. El artículo presenta una breve reseña histórica del origen y las vicisitudes por las que pasó la colección de autógrafos epistolares de Lope, valiéndose de documentos que no se habían tenido en consideración y de los datos que ahora conocemos del primer códice de cartas tras adquirirlo el Estado español en 2018. El análisis del códice nos permite destacar algunas de las peculiaridades presentes en él y en el conjunto de la colección, especialmente la intervención del Duque de Sessa sobre los mismos autógrafos.

Même s’il est difficile de parler de miroirs aux princes avant l’époque carolingienne, il existe durant les premiers siècles du Moyen Âge des textes qui s’adressent au roi pour lui présenter un portrait idéal. Ceux-ci possèdent des éléments rhétoriques récurrents, parmi lesquels l’idée que le souverain a reçu plus les autres hommes. Profane ou religieux, un tel message est décliné à travers différents genres littéraires ; selon le cas, il sert à l’éloge, au conseil ou à la critique.

Ce volume étudie le style de Samuel Beckett au miroir de ses lettres en ce qu’elles donnent une idée de l’évolution de son style épistolaire et littéraire. Il s’intéresse à ses propos métastylistiques et à ceux de ses correspondants, ainsi qu’à la parenté stylistique entre les lettres et l’œuvre., This volume studies Samuel Beckett’s style in the mirror of his letters, in so far as they provide an idea of the evolution of his epistolary and literary style. It examines his metastylistic comments and those of his correspondents, and the stylistic relationship between his letters and his work.

La correspondance de Beckett révèle la nécessité quasi-symptomatique de l’auteur de se raconter et la sensation d’être un “homme sans qualités”. La frontière poreuse entre genres épistolaire et diaristique accentue la confusion de l’épistolier et renforce le mouvement de désingularisation du texte épistolaire. La perspective plurielle de la voix auctoriale suggère l’effacement progressif d’une dichotomie entre égologie et altérité du rapport à soi et mène à une redéfinition du style épistolaire., Beckett’s correspondance reveals the almost symptomatic necessity to recount, and the feeling of being a ‘man without qualities’. The porous bondary between the epistolary and the diaristic genre reinforces the movement of unspecifying the epistolary text. The plural perspective of the authorial voice suggests the progressive effacing of a dichotomy between egology and otherness of the relationship to oneself, and leads to a redefining of the epistolary style.