This thesis undertakes a long-term follow-up of cheese production under Geographical Indications (GI) in Auvergne (Cantal, Salers, Laguiole, Saint-nectaire, bleu d'Auvergne and fourme d'Ambert), from the end of the Second World War to the present day. Tracing the history of Auvergne cheeses prompts us to question the legacy of a General Supply, the performance of "progress" in the decades that follow, and the emergence of "typicality" and "terroir" products at the heart of territorial development from the 1990s onwards. Through a geohistorical approach, the challenge of the thesis lies in understanding the decisions of the actors accessing the governance of the appellations (and thus the normative power) according to the agricultural, agri-food and societal evolutions. In addition to cheese producers, processors and ripeners, our work highlights the constant efforts to structure products in conjunction with scientific research, primarily by Inra. Producers, scientific research, public authority, but also consumers, the construction of the quality of cheese products in Auvergne is an ongoing process with the aim of ensuring the sustainability of dairy farms. This objective of viability first of all encourages cheese producers to believe in "progress", productivism, and the lowering of production and product costs, and, above all, to build a competitiveness guaranteed by the monopoly offered by the designation of origin. Governance then imposes a generic quality, a single model that was sufficiently inclusive and not very restrictive. The 1980s, marked by the seal of milk quotas, the reorientation of the CAP and the beginnings of territorial development in connection with a "quality" agriculture and criticism of intensive agriculture, brought about a change in doctrine, a new vision that was then validated by a new player, the Inao. Therefore, from the 1990s onwards, individually or on a collective scale, locally or within the appellation, various initiatives aim to make agricultural activity viable through a singularization by promoting typicality, including a typicality "linked to the terroir". Although imperfect, these initiatives contribute to the territorialisation of agriculture and the construction of a specific quality. This construction is first of all based on links thought with a current, pragmatic terroir, on the basis of a compromise between societal demands and production realities, but also between anteriority of practices and innovation, and not on a 'return' to possible practices carried away by productivism. Finally, our thesis demonstrates a quality which is co-constructed, plural and constantly evolving, and also conflictual, with its 'territorialisation' remaining one of the avenues explored by the actors. The different perceptions of quality and the support of distinct agricultural models fuel tensions, sometimes within the same appellation. However, the territorialisation of quality weakens the old mechanisms of governance, which do not disappear for all that. Finally, territorialisation raises questions about the coherence of the scales of action between those, localized, allowing the strengthening of links to the terroir and the more encompassing scale of the appellation., Cette thèse entreprend un suivi au long cours des productions fromagères sous Indications Géographiques (IG) en Auvergne (Cantal, Salers, Laguiole, Saint-nectaire, bleu d’Auvergne et fourme d’Ambert), depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours. Retracer l’histoire des fromages auvergnats incite à questionner les legs d’un Ravitaillement Général, la performativité du « progrès » des décennies qui suivent jusqu’à l’émergence de la « typicité » et des produits de « terroir » au cœur du développement des territoires à partir des années 1990. Par une approche géohistorique, l’enjeu de la thèse réside dans la compréhension des décisions des acteurs accédant à la gouvernance des appellations (et donc au pouvoir normatif) au gré des évolutions agricoles, agroalimentaires et sociétales. Au-delà des acteurs fromagers (producteurs, transformateurs, affineurs), notre travail met en avant les efforts constants de structuration des produits opérés en liens avec la recherche scientifique, l’Inra en premier lieu. Acteurs productifs, recherche scientifique, puissance publique, mais aussi consommateurs, la construction de la qualité des produits fromagers en Auvergne se fabrique en continue avec comme finalité la durabilité des exploitations laitières. Cet objectif de viabilité incite d’abord les acteurs fromagers à croire au « progrès », au productivisme, et à l’abaissement de coûts de production et des produits, et surtout à bâtir une compétitivité garantie par le monopole offert par l’appellation d’origine. La gouvernance impose alors une qualité générique, un modèle unique mais suffisamment englobant et peu contraignant. Les années 1980, marquées du sceau des quotas laitiers, des réorientations de la PAC et des prémices d’un développement territorial en lien avec une agriculture de « qualité » et d’une critique de l’agriculture intensive impulsent un changement de doctrine, une nouvelle vision validée ensuite par un nouvel acteur, l’Inao. Dès lors, à partir des années 1990, individuellement ou à l’échelle d’un collectif, localisées ou au sein de l’appellation, diverses initiatives entendent viabiliser l’activité agricole par une singularisation à travers une mise en avant de la typicité, dont une typicité « liée au terroir ». Imparfaites, ces démarches participent à une territorialisation de l’agriculture et la construction d’une qualité spécifique. Cette construction passe d’abord par des liens pensés avec un terroir actuel, pragmatique, à partir d’un compromis à la fois entre exigences sociétales et réalités productives, mais aussi entre antériorité des pratiques et innovation, et non sur un « retour » à d’éventuelles pratiques emportées par le productivisme. Notre thèse démontre en finalité une qualité coconstruite, plurielle et en constante évolution, conflictuelle aussi où sa « territorialisation » reste une des voies explorées par les acteurs. Les diverses perceptions de la qualité et soutenant des modèles agricoles distincts alimentent les tensions, parfois au sein d’une même appellation. Cependant, la territorialisation de la qualité fragilise les mécanismes anciens de gouvernance qui ne disparaissent pas pour autant. La territorialisation questionne enfin sur la cohérence des échelles d’action entre celles, localisées, permettant le renforcement des liens au terroir et l’échelle, plus englobante, de l’appellation.